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L’avenir de l’Initiative sur les utilisations pacifiques : faire face aux problèmes et aux situations d’urgence à l’échelle mondiale

Rebekka Koelbl

L’un des objectifs statutaires de l’AIEA est d’accélérer et d’accroître « la contribution de l’énergie atomique à la paix, la santé et la prospérité dans le monde entier ». Depuis dix ans, l’Initiative sur les utilisations pacifiques (PUI) œuvre efficacement à la réalisation de cet objectif en mobilisant des ressources extrabudgétaires destinées à soutenir les applications pacifiques de la technologie nucléaire.

Et demain, qu’en sera-t-il ? Comment la PUI évoluera-t-elle ces prochaines années ?

Le monde se trouve confronté à des problèmes de développement complexes (épidémies de zoonoses, changement climatique, pollution environnementale, pour n’en citer que quelques-uns), auxquels les technologies nucléaires peuvent apporter des solutions et qui poussent les gouvernements à solliciter l’appui de l’AIEA. Ces problèmes complexes que nous connaissons aujourd’hui à l’échelle planétaire nécessitent de plus en plus des initiatives, des interventions et des programmes intégrés et stratégiques à grande échelle dans tous les domaines.

Les annonces de contributions pluriannuelles faites dans le cadre de la PUI offrent une certaine souplesse à l’AIEA et lui permettent d’identifier et d’appuyer des projets remplissant ces critères, en fonction de l’évolution des besoins des États Membres. Elles continueront de tenir une place importante, en ce qu’elles faciliteront la mobilisation de financements prévisibles et laisseront aux donateurs la possibilité d’allouer des ressources à des initiatives majeures ou à des interventions d’urgence selon que de besoin.

Intervenir rapidement en cas d’épidémies de zoonoses

Cette année, la pandémie de COVID-19 a plongé le monde dans une situation d’urgence sans précédent, et la réaction en chaîne par polymérase après transcription inverse (RT-PCR), technique dérivée du nucléaire qui est utilisée pour détecter le virus responsable de la COVID-19, a joué un rôle déterminant dans la lutte contre cette pandémie. Dans le cadre du plus important projet de coopération technique qu’elle ait jamais mené, l’AIEA a apporté son concours pour mettre des connaissances techniques et du matériel à la disposition de plus de 120 pays. Outre les interventions d’urgence qu’exigent de telles situations dans l’immédiat, il est essentiel que les experts soient capables, partout dans le monde, de détecter et de caractériser les maladies dès les premiers stades, avant qu’elles ne puissent sur muer en épidémies.

Les zoonoses touchent environ 2,6 milliards de personnes chaque année. Les techniques nucléaires et dérivées du nucléaire peuvent aider les scientifiques à étudier, prévenir et contenir les foyers épidémiologiques de ces maladies. La mise en commun à l’échelle mondiale de données spatio-temporelles sur les pathogènes animaux et les maladies animales peut faciliter la prise rapide de décisions et aider les services vétérinaires et les autorités sanitaires à réagir sans tarder et à partager les informations avec les acteurs concernés. En prévision de futures épidémies, des activités de recherches coordonnées seront déployées pour faire en sorte que les experts nationaux puissent mieux comprendre l’effet des zoonoses sur la santé humaine et y faire face.

Pour répondre à ce besoin et prévenir de futures épidémies, l’AIEA a lancé le projet d’action intégrée contre les zoonoses (ZODIAC), une initiative globale, multisectorielle et pluridisciplinaire à l’échelle mondiale qui vise à améliorer la surveillance, le suivi et la détection rapide des pathogènes à l’origine des zoonoses. Le Réseau de laboratoires diagnostiques vétérinaires (VETLAB), qui bénéficie depuis plusieurs années d’un appui financier grâce à la PUI, servira de base à la mise sur pied d’un nouveau réseau de laboratoires élargi dans le cadre du projet ZODIAC. (Pour en savoir plus sur le Réseau VETLAB, voir cet article.)

La RT-PCR en temps réel est la méthode la plus précise pour détecter le virus responsable de la COVID-19. L’AIEA aide les pays à utiliser cette technique pour détecter les zoonoses (maladies transmissibles de l’animal à l’homme) telles que la COVID-19 et la fièvre Ebola.

(Photo : D. Calma/AIEA)

Combattre la pollution par le plastique

La pollution par le plastique gagne du terrain à une vitesse alarmante, menaçant les écosystèmes, la sécurité sanitaire des aliments, la santé humaine et le développement durable. En 2018, près de 360 millions de tonnes de plastique ont été produites à l’échelle mondiale et, chaque année, environ 8 millions de tonnes de déchets plastiques finissent dans les océans.

Les technologies nucléaires peuvent compléter les méthodes conventionnelles de réduction des déchets plastiques. Le processus d’irradiation peut être utilisé pour modifier la structure et les propriétés du plastique ou pour le décomposer en matières de base. Dans les deux cas, le nouveau matériau modifié ou fonctionnalisé ou la matière de base sont utilisés pour produire des articles en plastique commercialement viables, ce qui permet de générer des avantages économiques et de réduire le volume de déchets.

Le recyclage par les technologies des rayonnements est particulièrement intéressant quand le recyclage primaire des déchets plastiques n’est plus possible, de nombreux thermoplastiques ne pouvant être recyclés qu’une ou deux fois au moyen des technologies conventionnelles.

Les techniques nucléaires peuvent aussi être utilisées pour caractériser les microplastiques, les surveiller et en suivre les déplacements afin d’évaluer leur présence et leurs incidences sur l’environnement, y compris dans les océans.

Lutter contre le changement climatique

Pour honorer les accords internationaux et contenir l’élévation de la température de la planète en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, le secteur énergétique devra être décarboné.

Dans l’intervalle, l’évolution des modèles météorologiques affectent les systèmes agricoles, la production alimentaire mondiale et les moyens de subsistance des petits agriculteurs. Certains effets du changement climatique se font déjà sentir, les plus graves étant la pénurie d’eau et de nourriture et la perte de biodiversité. L’AIEA est appelée à jouer ici un rôle de plus en plus important, qui consistera à aider les pays à évaluer les conséquences du changement climatique et à s’y adapter grâce aux techniques nucléaires et isotopiques.

L’Agence continuera également à appuyer les efforts engagés en vue d’atténuer les effets du changement climatique en aidant les pays à évaluer le développement de leurs systèmes énergétiques et la contribution potentielle de l’électronucléaire à la production d’électricité. Les innovations dans le domaine de l’énergie nucléaire peuvent contribuer à faire progresser les pays sur la voie d’une énergie propre, et l’électronucléaire peut venir compléter les sources d’énergie renouvelable comme les énergies solaire et éolienne. Les projets et programmes visant à amener les États Membres à utiliser l’électronucléaire de manière sûre, durable et rentable grâce aux technologies innovantes demeureront une composante essentielle des travaux de l’AIEA soutenus financièrement par la PUI.

Modernisation des laboratoires de recherche

Le projet de rénovation et de modernisation des laboratoires des applications nucléaires de l’AIEA à Seibersdorf (Autriche) a reçu le soutien de la PUI, et cet appui devrait se poursuivre au cours des prochaines années. Trois nouveaux laboratoires seront construits afin de mieux répondre à l’évolution des besoins des États Membres en proposant des services de laboratoire et des formations relatives à l’alimentation et l’agriculture, à la santé humaine, à l’environnement et à la mise au point et l’utilisation d’instruments neutroniques (voir  cet article).

Sûreté des sources radioactives et des matières nucléaires

L’utilisation de la technologie nucléaire suppose l’existence d’une réglementation et d’une infrastructure nationales solides en matière de sûreté et de sécurité nucléaires. La coopération internationale permet, grâce à l’harmonisation des approches relatives notamment à la sûreté et à la sécurité du transport, à la sûreté de la gestion des déchets radioactifs et à la préparation et à la conduite des interventions d’urgence, d’offrir des avantages concrets aux pays qui utilisent les applications nucléaires pour se développer. Les fonds octroyés dans le cadre de la PUI complètent le programme de l’Agence sur la sûreté des sources radioactives et renforcent l’efficacité des systèmes nationaux utilisant les technologies nucléaires.

Les dix prochaines années seront l’occasion pour la PUI, avec le concours de partenaires des secteurs public et privé, de franchir une nouvelle étape pour optimiser la contribution de l’AIEA au règlement de problèmes mondiaux grâce aux technologies nucléaires.

11/2020
Vol. 61-4

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