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Mégadonnées et allaitement : pallier le manque d’éléments probants pour de meilleurs résultats en matière de santé

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Good breastfeeding practices in early childhood hold the key to proper child survival and development. Data accumulated using a stable isotope technique will continue to be crucial in building a narrative to promote good breastfeeding practices worldwide. (Photo: iStock.com/kate) 

À l’occasion de la Semaine mondiale de l’allaitement maternel, l’AIEA encourage davantage de pays à alimenter une base de données unique en son genre. La base de données de l’AIEA sur la consommation de lait maternel a été constituée à partir d’informations recueillies au moyen d’une technique nucléaire qui mesure avec précision la consommation de lait maternel et permet d’obtenir une mesure objective des taux d’allaitement exclusif au sein. Pour tirer pleinement parti de cet outil, il est nécessaire de disposer de données plus fiables, en particulier en provenance des pays à revenu élevé.

La Semaine mondiale de l’allaitement maternel, célébrée la première semaine d’août, est une initiative visant à protéger, promouvoir et appuyer l’allaitement maternel à tous les niveaux de la société. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, un nourrisson alimenté exclusivement avec du lait maternel pendant les six premiers mois de sa vie est protégé contre les infections et la mortalité infantile qui en découle.

La base de données sur la consommation de lait maternel de l’AIEA centralise des données recueillies, à ce jour, auprès de 34 pays à l’aide de la technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère. Cette technique permet non seulement d’obtenir des informations sur la quantité de lait maternel consommée par les nourrissons, mais également de déterminer si les nourrissons de moins de six mois sont exclusivement allaités au sein.

Cependant, le manque de données, notamment en provenance des pays à revenu élevé, empêche les chercheurs de comprendre pleinement les disparités observées dans les pratiques d’allaitement au niveau mondial. Des ensembles de données plus importants sont nécessaires pour remédier à ce manque d’éléments probants et orienter l’élaboration de politiques permettant d’améliorer les pratiques d’allaitement dans le monde entier.

Statistiques de la base de données sur la consommation de lait maternel.

« Les éléments probants publiés jusqu’à présent ne proviennent que d’une poignée de pays. Pour tirer des conclusions plus solides à l’appui des politiques et des pratiques, nous avons besoin de données supplémentaires », explique Victor Ochieng Owino, spécialiste de la nutrition à l’AIEA. « Les éléments disponibles proviennent principalement des pays du Sud. À l’avenir, il serait donc important de disposer également de données provenant des pays du Nord. »

L’AIEA aide les pays à utiliser une technique non radioactive faisant appel aux isotopes stables pour mesurer la consommation de lait maternel et déterminer si le nourrisson est nourri exclusivement au sein. Cette technique non invasive est plus précise pour mesurer le taux d’allaitement exclusif au sein que la méthode la plus couramment utilisée, à savoir l’autodéclaration par les mères du type d’aliments et de liquides qu’elles donnent à leurs enfants. La technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère permet de mesurer le débit de deutérium, un isotope stable naturel de l’hydrogène, échangé entre la mère et son nourrisson pendant l’allaitement. L’AIEA encourage les pays à utiliser cette technique pour suivre les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs en matière d’allaitement exclusif au sein. Cependant, à ce jour, peu de pays à revenu élevé ont utilisé cette méthode pour mesurer la consommation de lait maternel et le taux d’allaitement exclusif au sein.

En savoir plus : Qu’est-ce qu’un isotope ? | AIEA

« Nous avons constitué la base de données sur la consommation de lait maternel dans le but de créer un référentiel mondial unique et évolutif de données recueillies à l’aide de la technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère. Les études individuelles sur la consommation de lait maternel sont souvent difficiles à généraliser en raison de la petite taille de leurs échantillons. Notre objectif est de centraliser ces études afin de faciliter les analyses de données novatrices qui améliorent notre compréhension des pratiques d’allaitement et des facteurs déterminants connexes, et ainsi de permettre de concevoir des interventions plus efficaces pour promouvoir l’allaitement », déclare Cornelia Loechl, cheffe de la Section des études de nutrition et d’écologie sanitaire de l’AIEA.

Partout dans le monde, des pays s’appuient déjà sur les données recueillies à l’aide de la technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère pour élaborer leurs politiques de santé publique. Dans une étude récente, cette technique a été utilisée pour déterminer l’incidence des activités de sensibilisation sur l’allaitement exclusif au sein. Selon une étude collaborative menée en Mauritanie par l’intermédiaire du Ministère de la santé, de l’AIEA et de l’UNICEF, à l’issue de campagnes de sensibilisation, le taux d’allaitement exclusif au sein a presque doublé dans les zones d’intervention par rapport aux zones qui n’ont pas encore bénéficié de ces efforts.

Selon une étude menée en Afrique du Sud, où les taux d’allaitement exclusif au sein étaient historiquement très bas, des programmes de mentorat et de conseil ont permis d’améliorer sensiblement ces taux, évalués à l’aide de la technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère.

Cette technique nucléaire a également permis de réaliser des études pionnières sur le lien entre la sécurité alimentaire et la production de lait maternel. Il est ressorti d’un projet de recherche mené avec l’appui de l’AIEA dans l’ouest du Kenya que l’insécurité alimentaire est corrélée à une plus faible consommation de lait maternel, qui pourrait résulter d’un manque de consommation de nutriments par la mère. Avant cette étude, les effets de l’insécurité alimentaire sur l’allaitement n’avaient pas encore été évalués au moyen d’une mesure objective du taux d’allaitement exclusif au sein ou de la quantité de lait maternel consommée.

La base de données de l’AIEA sur la consommation de lait maternel a été lancée en 2022, et rassemble des informations provenant d’études menées dans le monde entier et pour lesquelles la technique de la dose d’eau deutérée administrée à la mère a été utilisée dans divers contextes. Bien qu’elle soit encore en cours de constitution, cette base permettra aux chercheurs d’explorer les liens qui existent entre les pratiques d’allaitement et les facteurs déterminants connexes, par exemple le statut socio-économique des mères partout dans le monde.

Par exemple, une première analyse a récemment été réalisée à l’aide de la base de données sur la consommation de lait maternel afin de trouver des liens entre le niveau d’éducation des mères et la consommation de lait maternel par les nourrissons. L’étude a permis de conclure qu’il n’y avait pas de différence significative dans la consommation de lait maternel en fonction du niveau d’éducation de la mère. Bien que cette analyse n’ait pas permis d’établir un lien concluant entre l’allaitement et le niveau d’éducation de la mère, les comparaisons réalisées en fonction de l’indice du développement humain (IDH) des pays ont fait apparaître une tendance à l’augmentation de la consommation de lait maternel dans les pays où l’IDH était le plus faible, ce qui renforce la nécessité de disposer de données supplémentaires pour évaluer objectivement les pratiques d’allaitement dans les pays à revenu élevé. Davantage de données sont nécessaires à l’échelle mondiale et dans différents contextes pour obtenir des résultats plus concluants. L’allaitement maternel, en tant que mesure pratique permettant d’assurer la survie et la protection de la santé des nourrissons et des femmes, est un élément central du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et est associé à de nombreux objectifs de développement durable (ODD).

L’allaitement maternel joue un rôle important dans la prévention de la malnutrition, la protection des nourrissons contre les infections et la réduction des taux de mortalité qui en découlent. Les enfants nourris au sein sont également moins susceptibles de présenter une surcharge pondérale ou de souffrir d’obésité, ce qui va dans le sens des objectifs définis en matière de nutrition. En outre, les femmes qui allaitent ont moins de risques de développer un cancer ou un diabète de type II, ce qui améliore la santé maternelle. L’allaitement favorise l’égalité des sexes car cette pratique soulève des questions liées aux droits sur le lieu de travail et à l’espacement des naissances.

Il est essentiel d’obtenir des données supplémentaires, tant dans les pays à revenu élevé que dans les pays à faible revenu, afin de pallier le manque d’éléments probants et d’orienter la prise de mesures visant à améliorer l’allaitement et la santé des générations futures.

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