You are here

Vers un cadre juridique mondial de sécurité nucléaire renforcé

Jonathan Herbach

Le cadre juridique mondial de sécurité nucléaire a nettement évolué ces dernières décennies. Au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis d’Amérique, les pays ont redoublé d’efforts pour le renforcer. L’objectif était d’être plus à même de prévenir et de détecter les actes terroristes et autres actes criminels ou intentionnels non autorisés mettant en jeu ou visant des matières nucléaires ou d’autres matières radioactives, des installations associées ou des activités associées, et de réagir à de tels actes.

De plus en plus de pays adhèrent aux instruments juridiques internationaux facilitant le renforcement de la sécurité nucléaire dans le monde, y compris des pays qui ne disposent pas d’installations ou de matières nucléaires comme celles utilisées dans les centrales nucléaires ou les réacteurs de recherche.

En avril 2024, 136 États au total étaient parties à l’Amendement à la Convention sur la protection physique des matières nucléaires (A/CPPMN). Entré en vigueur en mai 2016, ce dernier avait été rédigé dans le cadre de la vague de renforcement du cadre juridique mondial susmentionnée, dans l’optique de prévenir le terrorisme nucléaire et d’autres formes de terrorisme mettant en jeu des armes de destruction massive.

« Le cadre juridique mondial est un élément essentiel de la sécurité nucléaire planétaire », explique Peri Lynne Johnson, conseillère juridique et directrice du Bureau des affaires juridiques de l’AIEA. « Il jette les bases de régimes de sécurité nucléaire efficaces, établit des mécanismes de coopération et d’assistance pour atténuer autant que possible les conséquences radiologiques d’un incident de sécurité nucléaire et permet d’harmoniser les méthodes de lutte contre divers actes criminels ».

L’Amendement renforce considérablement la Convention initiale à plusieurs égards. Il oblige les États parties à assurer la protection physique de toutes les matières et installations nucléaires utilisées à des fins pacifiques et relevant de leur responsabilité ; érige la contrebande de matières nucléaires et le sabotage d’installations nucléaires en infractions pénales ; et facilite le renforcement de la coopération internationale, y compris l’assistance et le partage d’informations en cas de sabotage.

La Convention telle qu’amendée a été réexaminée pour la première fois en 2022, lors de la Conférence des parties à l’Amendement à l’A/CPPMN, qui s’est tenue au Siège de l’AIEA, à Vienne. Cette réunion a été l’occasion pour les États parties d’évaluer la mise en œuvre et l’adéquation de la Convention telle qu’amendée, à la lumière de la situation qui prévalait à l’époque.

Selon l’ambassadeur Benno Laggner, coprésident de la Conférence : « La conférence d’examen 2022 de l’A/CPPMN a été un succès : elle a débouché sur un document final consensuel, et ce en dépit d’un contexte géopolitique difficile. Elle a offert un cadre d’échange des informations, des enseignements et des meilleures pratiques, et a créé une dynamique favorable à la poursuite de l’universalisation de la CPPMN et de son Amendement. »

Efforts d’universalisation

L’AIEA continue d’encourager les États à adhérer à la Convention amendée et à la mettre en œuvre. Entre autres avantages, l’adhésion universelle aux instruments juridiques internationaux pertinents aidera à éliminer les failles que pourraient exploiter des terroristes et d’autres criminels désireux de commettre des actes malveillants et d’échapper à la justice.

« Le Zimbabwe est récemment devenu partie à l’A/CPPMN et entreprend actuellement des processus d’examen législatif pour vérifier que son cadre actuel est bien complet et qu’il lui permet de respecter ses obligations découlant de la Convention – preuve de son engagement continu en faveur d’un régime mondial solide de sécurité nucléaire », explique M. Justice Chipuru, Directeur général de l’Autorité zimbabwéenne de radioprotection. « L’universalisation de l’A/CPPMN garantira un monde plus sûr et plus sécuritaire. »

Toutefois, il faut encore encourager davantage d’États à devenir parties à la Convention amendée. En avril 2024, 28 États parties à la Convention n’avaient pas encore adhéré à son amendement, et 33 pays n’avaient adhéré ni à la Convention ni à son amendement.

Assistance de l’AIEA aux États

Aux fins de l’universalisation, l’AIEA offre une assistance législative et technique sous diverses formes y compris des réunions régulières, des ateliers régionaux et nationaux et des missions. En 2023, elle a tenu sa première réunion technique spécifiquement axée sur l’universalisation.

L’AIEA travaille également de manière bilatérale avec les États pour répondre aux besoins en matière de sécurité nucléaire. Elle s’appuie pour ce faire sur des plans intégrés d’appui en matière de sécurité nucléaire (INSSP), qui tiennent compte de l’adhésion aux instruments internationaux juridiquement contraignants et des lois nationales relatives à la sécurité nucléaire.

Dans son assistance législative, l’AIEA suit une approche globale, couvrant tous les aspects du droit nucléaire, notamment la sûreté, la sécurité et les garanties nucléaires ainsi que la responsabilité en cas de dommage nucléaire. Sur demande, elle travaille sur la législation nucléaire avec les États Membres pour les aider à sensibiliser et à former les responsables, ainsi qu’à rédiger, évaluer ou réviser leur législation nationale afin qu’ils puissent respecter leurs obligations découlant des instruments juridiques internationaux auxquels ils sont partie ou auxquels ils envisagent d’adhérer. Elle apporte en outre son concours à la rédaction et à la révision de dispositions juridiques nationales sur la sécurité nucléaire, la répression pénale et d’autres éléments constitutifs d’un cadre juridique national approprié.

Instruments juridiquement non contraignants

Outre les instruments juridiquement contraignants, plusieurs instruments juridiquement non contraignants jouent également un rôle important dans le cadre juridique mondial de sécurité nucléaire. Le Code de conduite sur la sûreté et la sécurité des sources radioactives offre des orientations pour aider à garantir un niveau de sûreté et de sécurité suffisant tout au long du cycle de vie des sources radioactives, de la production initiale au stockage définitif. Les États sont toujours plus nombreux à s’engager politiquement à suivre les orientations du Code, ainsi que les Orientations pour l’importation et l’exportation de sources radioactives et les Orientations sur la gestion des sources radioactives retirées du service qui le complètent. En avril 2024, 151 États avaient pris l’engagement politique de respecter le Code.

En outre, l’AIEA publie de plus en plus de documents d’orientation dans sa collection Sécurité nucléaire, pour aider les pays à renforcer leurs systèmes nationaux afin de protéger les matières nucléaires et autres matières radioactives et les installations connexes contre les activités non autorisées. Grâce aux publications de l’AIEA comme celles de cette collection, les États ont accès à des informations qui leur permettent d’agir en temps utile pour assurer efficacement la sécurité, et notamment de s’acquitter de leurs obligations découlant d’instruments juridiquement contraignants. Les détails techniques qu’elles contiennent ne pourraient pas nécessairement être inclus dans un traité.

05/2024
Vol. 65-1

Suivez-nous

Lettre d'information