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Sécurité nucléaire : s’adapter à un monde en mutation

Rafael Mariano Grossi, Directeur général de l’AIEA

Rafael Mariano Grossi

Depuis la dernière Conférence internationale de l’AIEA sur la sécurité nucléaire (ICONS) en 2020, le monde a connu de profonds bouleversements – parmi lesquels une pandémie mondiale et une guerre en Ukraine, où pour la première fois un grand programme électronucléaire se trouve entre deux feux.

Les relations internationales sont de plus en plus tendues et imprévisibles. D’un côté les progrès technologiques menacent la sécurité nucléaire, de l’autre ils offrent de nouveaux outils permettant de la renforcer. 

L’utilisation de la science et de la technologie nucléaires, souvent facilitée par l’AIEA, a progressé à pas de géant. Les changements climatiques et le besoin de sécurité énergétique suscitent un vif intérêt pour l’électronucléaire. Lors de la 28e Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28), les dirigeants mondiaux sont convenus, pour la première fois en près de 30 ans de réunions de la COP, que l’énergie nucléaire devait jouer un rôle dans la transition vers l’objectif zéro émission nette. Plus de 25 pays ont signé un engagement à tripler la capacité nucléaire et, lors du Sommet sur l’énergie nucléaire de l’AIEA tenu en mars, les chefs d’État ont jugé de concert qu’il était urgent d’instaurer des conditions financières propices à la réalisation de cet objectif.

Les applications de la science et de la technologie nucléaires qui permettent de sauver des vies ou d’améliorer la qualité de vie, qu’il s’agisse de permettre à des patients atteints de cancer d’accéder à la radiothérapie ou de recourir à l’irradiation pour créer de nouvelles variétés végétales utiles aux agriculteurs, sont de plus en plus utilisées.

Mais toutes ces applications exigent un régime mondial de sécurité nucléaire solide et adaptable et nous obligent à faire preuve d’une vigilance sans faille. Nous devons veiller à ce que des groupes mal intentionnés ne puissent pas utiliser des matières nucléaires ou radioactives pour semer la panique ou causer des dommages.  

La sécurité nucléaire relève de la responsabilité des pays mais ne peut être assurée sans une étroite collaboration ni le travail de facilitation que fait l’AIEA. 

Depuis 2013, la Conférence ICONS est un lieu de rencontre pour les ministres, les décideurs, les hauts fonctionnaires et les experts, qui peuvent y évaluer les priorités actuelles et se préparer à relever de nouveaux défis. La Conférence internationale sur la sécurité nucléaire ICONS 2024, organisée sur le thème « Façonner l’avenir », traitera des politiques, de la législation et de la réglementation ; de la technologie et de l’infrastructure de prévention, de détection et d’intervention ; du renforcement des capacités ; ainsi que de thèmes transversaux, tels que l’interface entre la sécurité nucléaire et la sûreté nucléaire.

La Conférence s’inscrit dans le cadre plus large des travaux de l’AIEA en matière de sécurité nucléaire, qui l’ont notamment amenée à jouer un rôle central dans l’adoption et la mise en œuvre de la Convention sur la protection physique des matières nucléaires et de son amendement de 2005.

Nous aidons les pays à améliorer leur capacité de protection, tant dans le monde physique que virtuel. Cette assistance est fournie dans le cadre des plans intégrés de durabilité en matière de sécurité nucléaire, des examens par des pairs et des services consultatifs.

Depuis 20 ans, nous accompagnons les pays dans la mise en œuvre de mesures de sécurité nucléaire lors de grandes manifestations publiques, telles que les Jeux olympiques et les dernières réunions de la COP. Grâce à notre base de données sur les incidents et les cas de trafic, les États Membres peuvent signaler les matières nucléaires et radioactives non soumises à un contrôle réglementaire.

Au fil des ans, le programme de sécurité nucléaire de l’AIEA s’est adapté aux besoins des pays et aux nouvelles menaces, difficultés et possibilités.

Le Centre de formation et de démonstration en matière de sécurité nucléaire que nous venons d’inaugurer est la preuve physique de l’augmentation des besoins en matière de formation pratique avancée à l’aide d’équipements spécialisés. 

Le monde a besoin d’une main-d’œuvre bien formée et diversifiée dans le secteur de la sécurité nucléaire. L’initiative « Les femmes dans la sécurité nucléaire » de l’AIEA promeut l’égalité des sexes dans ce domaine, et la « Délégation de la sécurité nucléaire pour l’avenir », qui se réunira lors d’ICONS 2024, donnera à des jeunes originaires de 19 pays la possibilité de participer, d’apprendre et d’apporter leur contribution. 

La sécurité nucléaire ne se limite pas à la prévention du terrorisme nucléaire. Il s’agit de fournir une énergie propre, des soins de santé de pointe, des aliments nutritifs et de porter l’espoir d’un avenir meilleur. L’AIEA est le point de rencontre mondial qui permet de rendre tout cela possible. 

05/2024
Vol. 65-1

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