You are here

Imagerie muonique : comment les rayons cosmiques aident à étudier les pyramides et les volcans

,

L’imagerie muonique aide à étudier des volcans assoupis tels que le Puy de Dôme (France). (Photo : Adobe Stock)

Les rayons cosmiques, présents en abondance dans notre environnement, se déplacent dans l’espace à une vitesse proche de celle de la lumière. Ils proviennent du Soleil ou de restes de supernovas de galaxies lointaines. Composés de billions de particules subatomiques, ils percutent la surface de la Terre chaque seconde. Lorsqu’ils entrent dans l’atmosphère, certains sont déviés par le champ magnétique de la planète et d’autres nous atteignent sans toutefois nous nuire. En traversant l’atmosphère, ils provoquent plusieurs réactions, produisant une multitude de nouvelles particules subatomiques, dont les muons.

En traversant l’atmosphère terrestre, les rayons cosmiques produisent une multitude de nouvelles particules, dont les muons. (Graphique : A. Vlasov/AIEA)

Les muons suscitent plusieurs questions : certaines de leurs propriétés s’écartent, subtilement mais de manière notable, du « modèle standard » de la  physique des particules. Cependant, les scientifiques ont trouvé moyen d’utiliser ces mystérieuses particules pour explorer, un peu comme en radiographie classique, l’intérieur de grands volumes auxquels on ne peut accéder physiquement, tels que les bâtiments anciens, les volcans ou les réacteurs nucléaires.

« Les muons sont invisibles mais omniprésents sur Terre. Ils nous traversent constamment, ainsi que les objets de notre environnement, à une vitesse proche de celle de la lumière », explique Ian Swainson, physicien nucléaire à l’AIEA. « Les muons sont sans danger pour l’homme mais peuvent pénétrer des centaines de mètres de roche et aider à comprendre la composition et les dimensions de matériaux invisibles à l’œil nu. »

« L’imagerie muonique fonctionne un peu comme la radiographie aux rayons X ou gamma, utilisée en médecine pour scanner le corps et dans l’industrie pour évaluer l’intégrité et la sûreté des structures et des composants », précise Andrea Giammanco, physicien des particules et co-auteur de la publication sur l’imagerie muonique. « Contrairement à ces types de radiographie qui utilisent des rayonnements artificiels intenses produits par des accélérateurs de particules ou des sources radioactives, la radiographie par muons utilise les rayons cosmiques produits naturellement dans l’espace. »

On distingue deux types d’imagerie muonique : la muographie et la tomographie muonique.

La muographie consiste à placer un détecteur en dessous ou à côté d’une structure pour capter les muons qui la traversent. Plus le matériau de la structure est dense, plus grande sera la quantité de muons absorbés. Certaines des particules qui traversent la structure seront captées par les détecteurs placés à proximité. Sur l’image obtenue, les espaces que les muons traversent facilement apparaissent comme des points lumineux, tandis que les points plus sombres représentent les espaces qu’ils traversent plus difficilement.

Alors que la muographie repose sur l’absorption des muons par les matériaux, la tomographie muonique se fonde sur la manière dont les muons sont émis. Ainsi, en utilisant deux détecteurs placés de part et d’autre d’une voiture ou d’un conteneur, les experts peuvent observer comment les particules sont déviées par des matériaux à haute densité contenant un grand nombre de protons. On peut ainsi inspecter l’intérieur de la voiture ou du conteneur sans l’ouvrir.

Muography. (Graphic: A. Vlasov/IAEA)

Depuis les premières expériences réalisées dans les années 1950, l’imagerie muonique est appliquée à plusieurs types d’objets dans le monde. La muographie est utilisée pour étudier la structure interne du Vésuve, près de Naples, qui a tragiquement anéanti la cité romaine de Pompéi et plusieurs autres localités en l’an 79 de notre ère. Les chercheurs s’emploient à visualiser le fonctionnement interne du Vésuve à l’aide de détecteurs de muons afin d’améliorer leur modélisation, essentielle pour prévoir une éruption potentielle et son évolution, et pour prendre des mesures d’atténuation des risques pour les populations riveraines. Le volcan est inactif depuis sa dernière éruption en 1944.

L’imagerie muonique a également servi à étudier l’ancienne muraille de Xi’an en Chine, un cyclone passant au-dessus du Japon, des glaciers dans les Alpes et récemment un réacteur nucléaire en cours de démantèlement en France.

L’AIEA organisera en 2024 un atelier sur la tomographie muonique : des principes de base à l'utilisation et aux applications pratiques. Les participants examineront les différentes applications pratiques de la technique, les propriétés des détecteurs utilisés, la reconstruction algorithmique des traces de muons, l’analyse des données et la reconstruction d’images.

Une nouvelle publication de l’AIEA explique en détail les principales techniques et les types de détecteurs utilisés en imagerie muonique. Elle décrit également différentes applications, dont l’étude de bâtiments modernes et anciens, de volcans et de structures industrielles, ainsi que l’amélioration de la sécurité et des garanties nucléaires. « Cette publication explique en détail l’imagerie muonique. Elle aidera les professionnels du secteur et les universitaires à mieux comprendre ce domaine en pleine évolution », affirme M. Swainson. Pour consulter la publication sur l’imagerie muonique, cliquez ici.

Suivez-nous

Lettre d'information