DOUALA et YAOUNDÉ (CAMEROUN) – Le cacao représente plus de 8 % de la production agricole du Cameroun, mais les exportations sont fragilisées par un manque de possibilités locales de contrôle de la qualité.
« Sans assurance de la qualité ni tests microbiologiques, le prix de vente est mauvais et le revenu des producteurs est maigre, ce qui perpétue la pauvreté », explique Elie Bertrand Mutngi, chef de la Direction de la qualité et de la durabilité à l’Office national camerounais du cacao et du café.
La situation va changer, car une entreprise locale qui utilise depuis longtemps les techniques nucléaires pour effectuer des tests dans le secteur du pétrole et du gaz en propose maintenant pour détecter les résidus chimiques et les contaminants dans le cacao et le café. La certification qu’elle délivre, et que les exportateurs ne pouvaient obtenir auparavant qu’auprès de laboratoires européens, est indispensable à l’exportation vers la plupart des pays.
Cette entreprise majoritairement publique de Douala, HYDRAC, a déjà utilisé des techniques nucléaires pour effectuer des essais non destructifs sur des canalisations, des matériaux de constructions et des hydrocarbures. Le début de sa coopération avec l’AIEA remonte à 1995, lorsqu’il a fallu procéder à de tels essais pendant la construction d’un oléoduc reliant le territoire enclavé du Tchad à la côte camerounaise.
La sécurité alimentaire, l’un des piliers de la stratégie nationale de développement 2020-2030, nécessite des systèmes pour assurer la sécurité sanitaire des aliments. En outre, la sûreté et la qualité des aliments sont essentiels pour accroître les exportations du pays. C’est pourquoi HYDRAC a décidé de diversifier ses services et de proposer des tests alimentaires, explique David Ekoume, administrateur général de l’entreprise. Des produits tels que le cacao et le café contiennent parfois des résidus de pesticides et d’autres toxines en quantité supérieure aux limites de sûreté fixées par l’Union européenne et d’autres grands marchés.
Dans le cadre de son programme de coopération technique et en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’AIEA a aidé à former sept chimistes analystes et gestionnaires à utiliser les techniques d’analyse nucléaires et fondées sur le nucléaire en sécurité sanitaire des aliments. Elle a aussi fourni du matériel, notamment un spectromètre d’absorption atomique, un chromatographe en phase gazeuse couplé à un spectromètre de masse et des kits de dosage par radiorécepteur pour que le laboratoire puisse effectuer les tests nécessaires (voir l’encadré « En savoir plus »).
« Auparavant, une grande partie des exportations de cacao et de café du pays étaient refusées par les importateurs ou ne pouvaient être vendues que localement, à des prix inférieurs, faute de tests », explique M. Ekoume. « C’est encore le cas d’autres produits agricoles d’exportation, comme les bananes et les ananas. Nous nous efforçons donc d’être accrédités comme laboratoire général de sécurité sanitaire des aliments. »
Depuis cette année, le laboratoire peut vérifier la présence de mycotoxines, de résidus de pesticides, de métaux toxiques, d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), naturellement présents dans le pétrole et qui peuvent contaminer les aliments, ainsi que de polychlorobiphényles (PCB), une substance hautement cancérigène utilisée autrefois dans des produits industriels et de consommation. M. Ekoume dit que le laboratoire d’HYDRAC devrait obtenir cette année, en août 2022, une accréditation ISO étendue à tous les aliments et non plus seulement au cacao et au café.