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Des spécialistes de l’étude des sols unissent leurs efforts afin de trouver des moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre

Participants sur le site expérimental d’enrichissement en dioxyde de carbone en atmosphère libre de l’Université Justus Liebig de Giessen (Allemagne). (Photo: M. Zaman/AIEA)

Il a été démontré qu’une utilisation équilibrée des engrais, de l’eau et des sols en agriculture permettait de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), qui sont une cause du changement et du réchauffement climatiques. Mais pour trouver le meilleur équilibre, il est nécessaire de bien comprendre les différentes caractéristiques du sol et de l’environnement et les diverses pratiques agricoles qui influent sur ces facteurs. Afin de définir des méthodes permettant de parvenir à cet équilibre, les scientifiques font de plus en plus souvent appel aux techniques isotopiques et ils définissent des orientations fondées sur des données scientifiques en vue de favoriser la réduction et l’atténuation des émissions de GES.

«Au Brésil, l’agriculture et l’élevage utilisent déjà des processus de production qui contribuent à atténuer les émissions de GES et n’ont qu’un impact minime sur l’environnement, mais nous avons besoin de mieux comprendre les incidences de ces processus sur l’agriculture et la réduction des émissions», explique Segundo Urquiaga, l’un des chercheurs de l’Entreprise brésilienne de recherche agropastorale, qui a participé à un projet en cours sur l’atténuation des émissions de GES organisé avec le soutien de l’AIEA et mené en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). «C’est à ce niveau que notre collaboration avec l’AIEA nous est utile.»

Le Brésil étudie avec l’AIEA depuis plus de 30 ans l’impact de l’agriculture sur l’environnement, celle-ci étant à l’origine de plus de 35 % des émissions de GES du pays. Il a ainsi réussi à réduire ses émissions de GES d’environ 20 %.

L’AIEA et la FAO offrent à des scientifiques du monde entier une structure qui leur permet de travailler ensemble à la mise en application des techniques isotopiques et connexes pour l’étude, dans différentes conditions climatiques, des processus naturels qui sont à l’œuvre dans le sol, les végétaux et les engrais. Il s’agit, à terme, d’optimiser les pratiques agricoles de manière à préserver les ressources tout en réduisant les émissions de GES.

Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, l’agriculture est à l’origine de plus d’un cinquième des émissions mondiales de GES imputables à des activités humaines. Les gaz à effet de serre, notamment le dioxyde de carbone (CO2 ), l’oxyde nitreux (N2 O) et le méthane (CH4 ), piègent la chaleur dans l’atmosphère terrestre en absorbant le rayonnement thermique de la Terre, ce qui fait augmenter la température sur la planète. Si l’effet de serre est un processus naturel qui rend possible la vie sur Terre et régule la température dans l’atmosphère, les quantités excessives de GES émises ont donné lieu à un réchauffement climatique.

La communauté internationale cherche, à travers des accords comme la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, à limiter les émissions de GES et à atténuer leur impact.

Apprendre les uns des autres

Grâce à ces études mondiales, les scientifiques espèrent pouvoir affiner les méthodes d’atténuation des GES et mieux comprendre le fonctionnement de ces processus. Certains pays, comme le Brésil, sont plus avancés dans leurs recherches, et leur expérience est d’une grande aide pour ceux qui débutent. Par ailleurs, les conditions environnementales et l’expérience propres à chaque pays permettent même à ceux qui sont le plus en avance de tirer des enseignements de cette collaboration.

«Nos échanges avec des scientifiques qui en sont à différents stades de la recherche nous permettent d’élargir nos connaissances et de constituer un réseau efficace. Toutes ces perspectives différentes nous aident, tous ensemble, à faire progresser plus vite ce processus de recherche, qui pourrait sans cela durer des années», ajoute María Adriana Nario Mouat, chercheuse à la Commission chilienne de l’énergie nucléaire.

La réduction des émissions de GES (voir Gestion des émissions de gaz à effet de serre) dues à l’agriculture est l’un des aspects centraux de la lutte contre le changement climatique, mais il convient de mettre en œuvre ce processus de façon équilibrée, de sorte que les agriculteurs puissent continuer à produire suffisamment de nourriture et à subvenir à leurs besoins, explique Christopher Müller, expert en sol et en végétaux à l’Université Justus Liebig de Giessen (Allemagne). «Le fonctionnement de ces processus naturels peut être influencé par de nombreux facteurs, et ils changent d’un écosystème à un autre. En comprenant mieux comment ils opèrent, nous pourrions contribuer à faire évoluer les pratiques agricoles de manière à améliorer la situation dans le monde, tout en préservant les ressources que recèle le sol.»

À mesure que les données scientifiques sont recueillies, elles peuvent être intégrées aux méthodes nationales d’atténuation des GES, explique Mme Nario Mouat : «Les responsables politiques ont besoin de ces informations pour prendre des décisions sur les moyens de limiter ces émissions de gaz dans leur pays, ainsi que pour amener les agriculteurs à adopter ces méthodes. Les travaux que nous menons aujourd’hui s’inscrivent dans ce processus».

Un travail en profondeur

Les techniques isotopiques aident les scientifiques à connaître plus en détail les processus naturels qui sont à l’œuvre dans le sol, les végétaux et les engrais. Ces techniques font appel aux isotopes, qui sont des atomes d’un même élément possédant un nombre de protons identique mais un nombre différent de neutrons. L’azote 15 est un isotope stable de l’azote, et le carbone 13 est un isotope du carbone. Les deux sont présents à l’état naturel dans le sol, les engrais, l’eau et les végétaux. Il est possible de les utiliser pour mesurer et suivre la formation, l’émission et l’absorption de gaz tels que le CO2 et le N2 O, ainsi que pour déterminer à quels moments ces processus interviennent.

«Les techniques isotopiques, qui sont extrêmement précises, aident les scientifiques à mieux comprendre ce qui se passe à chacune des étapes du processus, ce que ne permettent pas les techniques classiques», explique Mohammad Zaman, pédologue à la Division mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture. «Elles nous permettent également de proposer aux agriculteurs des moyens durables de cultiver leurs terres, d’économiser de l’eau et de réduire le recours à de coûteux engrais tout en préservant les précieuses ressources de la planète.»

Nos échanges avec des scientifiques qui en sont à différents stades de la recherche nous permettent d’élargir nos connaissances et de constituer un réseau efficace. Toutes ces perspectives différentes nous aident, tous ensemble, à faire progresser plus vite ce processus de recherche, qui pourrait sans cela durer des années.
María Adriana Nario Mouat, chercheuse à la Commission chilienne de l’énergie nucléaire

Étude d’enrichissement en dioxyde de carbone menée en atmosphère libre dans une prairie permanente à l’Université Justus Liebig de Giessen (Allemagne). (Photo: M. Zaman /AIEA)

Quelques chiffres

Les pertes économiques dues à l’oxyde nitreux provenant des engrais chimiques sont estimées à environ 469 millions de dollars par an.

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