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Défi de production participative de l’AIEA sur les matériaux de fusion nucléaire : les lauréats dévoilés

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Aldo Malavasi, Directeur général adjoint chargé des sciences et des applications nucléaires, remet le prix du Défi de l’AIEA sur les matériaux de fusion à Udo von Toussaint, chef du Groupe de modélisation et de surfaces en plasma-matériaux à l’Institut Max-Planck de physique des plasmas. (Photo : AIEA)

Une équipe de quatre scientifiques de l’Institut Max Planck de physique des plasmas et du Centre de calcul et de traitement des données Max Planck à Garching (Allemagne) a remporté, au mois d’octobre 2018, le défi de production participative lancé par l’AIEA sur la visualisation, l’analyse et la simulation de matériaux destinés à la construction de réacteurs de fusion.

La fusion nucléaire, réaction atomique qui fait briller le soleil, pourrait à terme être une source illimitée d’énergie abordable, propre et sans carbone utilisant les isotopes de l’hydrogène obtenus à partir de l’eau et du lithium. Cependant, l’exploitation d’une énergie de fusion commercialement viable soulève d’importantes difficultés technologiques, comme la capacité à protéger la paroi et les autres composants de la cuve du réacteur des températures extrêmement élevées et des particules de haute énergie auxquelles ils sont exposés.

Quatorze équipes originaires de dix pays ont présenté des analyses innovantes de simulations de l’endommagement d’une paroi de réacteur, susceptible d’être causé par les neutrons de haute énergie qui sont libérés durant une réaction de fusion. Les simulations ont été évaluées à l’aune de leur intérêt scientifique, du caractère novateur de l’algorithme lui-même ou de son application au domaine de la science des matériaux ainsi que de l’utilité et de l’impact escompté de la visualisation.

« Parmi les propositions que nous avons reçues, certaines étaient d’une qualité exceptionnelle. C’était un peu comme si nous avions organisé une compétition de football locale et qu’une équipe championne du monde avait finalement décidé de participer », se réjouit Sergei Dudarev, l’un des initiateurs du défi, qui est responsable du programme sur les matériaux à l’Autorité de l’énergie atomique du Royaume-Uni.

Les membres de l’équipe lauréate – Udo von Toussaint, Javier Dominguez, Markus Rampp et Michele Compostella – ont appliqué, pour la toute première fois, une technique issue de l’apprentissage automatique et de la science des données pour déterminer et classer les structures de défauts dans les cristaux endommagés dans le cadre de la simulation.

« Cette solution ouvre la voie à une nouvelle manière positive de classer automatiquement les structures de défauts, ce qui permet de déterminer, en termes quantitatifs, les facteurs communs et les différences entre les matériaux », explique Arjan Koning, chef de la Section des données nucléaires de l’AIEA. « Dans le contexte de l’étude des matériaux pour la chambre à vide d’un réacteur à fusion nucléaire comme l’ITER, il s’agit d’un moyen efficace de mesurer, classer et visualiser les dommages causés à un matériau donné par les neutrons de haute énergie qui sont libérés par le réacteur. La recherche d’un matériau adapté pour la première paroi de la cuve du réacteur est une étape essentielle vers un projet viable de construction d’une centrale à fusion. »

L’approche proposée par les lauréats présente plusieurs avantages par rapport aux méthodes existantes. En voici un aperçu :

• les nouveaux types de défauts ou ceux qui apparaissent de manière inattendue peuvent être identifiés et classés automatiquement ;

• l’approche est fondée sur une combinaison d’algorithmes puissants et précis tirés de la science des données ;

• elle permet de faire la distinction entre les véritables défauts et les petites altérations temporaires causées par le mouvement thermique des atomes ; et

• elle est suffisamment rapide pour être appliquée pendant la progression de l’endommagement simulé du cristal, ce qui permet de mieux comprendre comment les défauts se forment, se combinent et, dans certains cas, finissent par disparaître lorsque les atomes reprennent leur position initiale dans le réseau cristallin.

Jusqu’à présent, l’identification et la classification des défauts nécessitaient beaucoup de personnel et de temps, raison pour laquelle ces tâches n’étaient généralement réalisées qu’à la fin des simulations moléculaires. Ce nouvel algorithme peut être appliqué durant la simulation du défaut cristallin à chacune des étapes, ce qui peut aider à mieux comprendre à quel moment certains types de défauts apparaissent et disparaissent. On dispose ainsi de beaucoup plus d’informations sur le système, informations qui n’étaient guère accessibles jusqu’ici et qui nous permettent de distinguer les types de défauts qui sont susceptibles de durer de ceux qui ne le sont pas.

« Nous espérons que notre approche permettra d’accélérer considérablement l’analyse des simulations de la dynamique moléculaire », indique Udo von Toussaint. « La puissance de calcul des ordinateurs progresse constamment, alors que les capacités manuelles sont limitées. Dès que l’on peut utiliser les moyens informatiques plutôt que les moyens humains, c’est la garantie d’avancées scientifiques plus rapides. »

Comme a tenu à le préciser M. Toussaint, les lauréats du défi permettront à toutes les personnes intéressées de bénéficier d’un accès libre et gratuit à leur code. D’autres institutions et experts, essentiellement des spécialistes des matériaux, pourraient s’en servir pour analyser les résultats de leurs simulations, en particulier celles portant sur l’endommagement des solides par irradiation.

Selon Arjan Koning, l’AIEA entend tirer parti de la réussite de son défi en mettant au point une application d’informatique distribuée qui pourra être téléchargée par des volontaires pour exécuter des simulations d’endommagement de matériaux de fusion. Cette initiative pourrait donner une forte impulsion à l’étude de nouveaux matériaux destinés à la construction d’un réacteur de fusion et ainsi aider les scientifiques à mieux comprendre leur comportement dans des conditions aussi extrêmes.

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