En Jordanie, pays où la rareté de l’eau est de plus en plus préoccupante, une nouvelle unité de traitement des eaux souterraines mise au point grâce au soutien de l’AIEA, commencera bientôt à alimenter des milliers de foyers du gouvernorat d’Aqaba, à la pointe sud du pays, en eau potable de qualité. Ce système de traitement pilote, premier de ce type en Jordanie, élimine les radionucléides naturels des eaux souterraines, ce qui permet à la Régie jordanienne des eaux d’exploiter les aquifères auparavant non utilisés et de faire en sorte que les sources d’eau existantes soient moins sollicitées.
En raison de son climat semi-aride caractérisé par de faibles taux de précipitations et du fait de sa population en pleine expansion, la Jordanie figure parmi les dix pays qui ont les plus faibles taux de disponibilité d’eau douce par habitant au monde. De plus, cette situation devrait s’aggraver. Selon le Bureau régional OMS de la Méditerranée orientale (EMRO), si des mesures efficaces ne sont pas prises, le pays entrera dans un état d’extrême pauvreté en eau d’ici à 2025.
Au nombre de ces mesures figure l’exploitation des ressources d’eaux souterraines plus profondes et plus anciennes comme l’aquifère de Ram, entouré de grès et regorgeant d’importantes quantités d’eau douce de haute qualité peu susceptible de présenter des risques de contamination anthropique. Cependant, le grès présente généralement de fortes concentrations de radionucléides naturels, notamment le radium, qui peuvent être dangereux pour les consommateurs d’eau.
Grâce au soutien du programme de coopération technique de l’AIEA, des spécialistes de l’analyse isotopique et de la technologie des déchets ont aidé les experts jordaniens à mesurer et à surveiller la concentration en radium des eaux souterraines prélevées dans l’aquifère de Ram et à examiner un certain nombre d’options pour leur traitement.
Les résultats de ces analyses ont justifié la construction et l’installation d’une unité de traitement, située à proximité d’un puits d’eau. Ce dispositif de traitement permet de filtrer l’eau en y ajoutant de l’oxyde de manganèse hydraté et en la faisant passer par la suite par une série de filtres en céramique, ce qui fait baisser les teneurs en radionucléides jusqu’à un niveau conforme aux normes jordaniennes.
Après réception des premiers équipements de base, comme les pompes et les dispositifs de mesure, l’assemblage de l’équipement de traitement des eaux a commencé en février 2020, et le travail de génie civil et de construction le mois suivant. En décembre 2020, l’unité de traitement était achevée et prête à être mise en service par Aqaba Water Company, l’autorité locale chargée de la distribution de l’eau. Cette nouvelle unité, d’une capacité de traitement de 40 mètres cubes par heure, soit 12,5 litres par seconde, devrait permettre d’approvisionner en eau près de 2 000 personnes.
« Nous prévoyons de mettre en place plus d’unités pour traiter les ressources en eau dans la ville d’Aqaba, ainsi que dans de nouveaux puits d’eaux souterraines situés dans la région méridionale du gouvernorat d’Amman, dans une zone appelée Khan Alzabib », déclare Amal Al-Sayaheen, Directeur de la recherche et des services techniques à la Régie jordanienne des eaux.
Toutes les matières de la croûte terrestre contiennent des radionucléides naturels disséminés dans les roches et les sols à des concentrations d’activité généralement faibles. Cependant, ils pourraient s’infiltrer dans les eaux souterraines, donc dans l’eau potable provenant des eaux souterraines et des sources. « La présence de radionucléides pourrait justifier une analyse minutieuse destinée à expliquer les risques radiologiques liés à la consommation de ces eaux », soutient Horst Monken-Fernandes, spécialiste de la remédiation de l’environnement à l’AIEA qui assiste la Jordanie dans le cadre de ce projet.
La radioactivité dans l’eau potable constitue une source de préoccupations dans beaucoup de pays du monde. Dans le cadre de la Conférence internationale sur la gestion des matières radioactives naturelles dans l’industrie, l’AIEA a récemment organisé un atelier intitulé « Eaux souterraines 360° » à l’occasion duquel les participants ont examiné différents aspects liés à la présence de radionucléides dans les eaux souterraines.