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Unir les pays par la recherche et la coopération sur la fusion

Elodie Broussard

Plus de 100 dispositifs de fusion (publics et privés) sont en exploitation, en chantier ou en cours de planification. (Source : Fusion Device Information System, AIEA)

« Visez la lune. Même si vous ne l’atteignez pas, vous vous retrouverez parmi les étoiles », a dit un jour l’auteur Norman Vincent Peale. Avec la fusion nucléaire, ce sont bien les étoiles que visent les scientifiques en cherchant à déterminer s’il est possible de produire sur Terre de l’électricité de fusion à l’échelle industrielle.

Dans le monde, des experts d’une cinquantaine de pays contribuent à la recherche sur la physique des plasmas et au développement de la technologie de fusion nucléaire. Nombre de ces pays s’emploient actuellement à intensifier leurs programmes de recherche sur la fusion pour faire face à une demande énergétique en croissance rapide et à l’accélération du changement climatique due à l’utilisation des combustibles fossiles.

À l’appui des efforts menés actuellement à l’échelle internationale, l’AIEA propose à ses États Membres diverses activités de recherche et de renforcement des capacités — parfois au niveau régional — en vue d’aider certains pays à acquérir les connaissances et l’expérience nécessaires pour rattraper leur retard dans le domaine de la fusion.

Au cours des 50 dernières années, l’AIEA a appuyé la recherche-développement sur la fusion dans le monde entier en organisant divers forums, notamment la Conférence internationale sur l’énergie de fusion, qui a lieu tous les deux ans. L’AIEA organise également une série d’ateliers sur les concepts de centrale de démonstration à fusion, une série de réunions techniques sur des sujets en lien avec la science et la technologie de la fusion, ainsi que des activités de recherche coordonnée dans le cadre desquelles des institutions et des scientifiques se réunissent pour travailler sur des questions d’intérêt commun.

Dans ses publications sur la fusion, notamment dans des revues telles que Nuclear Fusion, l’AIEA diffuse des études et des informations, tout en contribuant à propager des connaissances approfondies au sein de la communauté scientifique. Parallèlement à son portail sur la fusion et à sa base de données des dispositifs de fusion, l’AIEA a constitué des bibliothèques numériques regroupant des données moléculaires et nucléaires fondamentales, qui sont indispensables pour la recherche et le développement de la technologie de fusion. Dans le cadre de ses collaborations avec de nombreux partenaires, l’AIEA organise et appuie également des activités de formation théorique et pratique sur le thème de la fusion, notamment des écoles et des ateliers internationaux et régionaux.

Nouveau venu sur la scène mondiale de la fusion, le Costa Rica s’appuie sur l’aide de l’AIEA pour rattraper son retard par rapport aux autres pays grâce au développement technique et au renforcement des capacités. En 2019, un atelier organisé par l’Institut de technologie du Costa Rica avec l’appui de l’AIEA a été l’occasion pour des participants de pays d’Amérique latine de prendre part à des expériences conjointes et de se former à l’utilisation des deux petits dispositifs de fusion de l’institut.

Resserrer les liens entre les chefs de file de la fusion et les pays contributeurs

L’Union européenne, par l’intermédiaire d’Euratom, et six pays coopèrent dans le cadre de la plus grande expérience de fusion au monde : ITER, réacteur de fusion expérimental en construction en France.

« Pour les pays qui ne prennent pas part au projet, l’AIEA joue un rôle important en relayant les connaissances acquises grâce à ITER à l’ensemble de la communauté, et vice versa. Pour ce faire, elle organise des réunions techniques, des ateliers et des écoles, et élabore des supports de formation en ligne, avec le concours d’experts d’ITER », explique Danas Ridikas, Chef de la Section de la physique de l’AIEA.

Donné à la Thaïlande en 2018, le tokamak HT-6M est l’un des principaux piliers de la feuille de route du pays pour la fusion. (Photo : ASIPP, Chine)

« La Thaïlande sera très bientôt dotée de son tout premier dispositif de fusion et, grâce à ce projet, le pays pourra lancer son propre programme de fusion.
Boonyarit Chatthong, Professeur auxiliaire, Université Prince de Songkla (Thaïlande)

Une inspiration pour la nouvelle génération en Asie du Sud-Est

Depuis 2014, l’École de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur le plasma et la fusion nucléaire est l’une des principales activités menées pour aider la Thaïlande à lancer son programme de fusion et faire progresser la recherche dans ce domaine dans la région. En janvier 2020, l’AIEA et ITER ont aidé cette école à promouvoir les contacts entre jeunes talents et chercheurs de renommée internationale. « L’AIEA a envoyé des experts qui, ayant partagé leurs connaissances et leur expérience avec les participants, ont été une grande source d’inspiration pour la nouvelle génération », se félicite Kanchalika Dechates, Chef de la Coopération internationale à l’Institut thaïlandais de technologie nucléaire (TINT). Plus de 80 jeunes chercheurs de la région ont participé à l’école.

Pour renforcer la formation et la collaboration entre les équipes de recherche des pays développés et en développement, l’AIEA mène depuis 2004 un projet de recherche coordonnée sur les dispositifs de fusion de moyenne et de petite taille, auquel contribuent des chercheurs de 19 pays. « Ce projet donne l’occasion à des chercheurs thaïlandais de rencontrer de nombreux experts du monde entier et de travailler en collaboration avec eux », explique Boonyarit Chatthong, Professeur auxiliaire à l’Université du Prince de Songkla, en Thaïlande.

Grâce à ce partenariat de longue date, il est possible de réaliser des expériences conjointes et comparatives, de former le personnel d’institutions et de pays différents, et de permettre à la nouvelle génération de spécialistes de la fusion d’acquérir des connaissances théoriques et techniques de pointe. « La Thaïlande sera très bientôt dotée de son tout premier dispositif de fusion et, grâce à ce projet, le pays pourra lancer son propre programme de fusion », se réjouit Boonyarit Chatthong.

La construction d’un tokamak expérimental représente la clé de voûte du programme de développement de la fusion dans le pays. Il s’agira du premier dispositif de fusion exploité par l’ASEAN et d’une pièce centrale dans la stratégie de formation des chercheurs en Thaïlande et dans les pays de l’ASEAN.

En 2018, l’AIEA a versé des subventions à des scientifiques et ingénieurs thaïlandais afin de leur permettre d’assister à la Conférence de l’AIEA sur l’énergie de fusion, qui s’est tenue en Inde. Cette année-là, un chercheur thaïlandais a aussi pris part à la session commune CIPT-AIEA sur la physique des plasmas, qui a rassemblé en Italie quelque 70 doctorants de niveau supérieur, chercheurs post-doctorants et autres jeunes chercheurs de 23 pays, favorisant ainsi la collaboration internationale.

05/2021
Vol. 62-2

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