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Réglementer les réacteurs de recherche, au Maroc et ailleurs

Laura Gil

Une équipe effectue l’inspection réglementaire d’un réacteur de recherche.

(Photo : AMSSNuR)

Les réacteurs de recherche ont beau être plus petits, plus simples et nécessiter moins de combustible que les réacteurs nucléaires de puissance, ils n’en doivent pas moins se conformer à des réglementations très strictes en matière de sûreté et de sécurité.

« Toute activité ou pratique mettant en jeu des sources de rayonnements ionisants, à moins qu’elle ne soit exemptée ou exclue d’un régime réglementaire, doit être réglementée et contrôlée. En l’absence de contrôle, elle risque de faire plus de mal que de bien », avance Khammar Mrabit, directeur général de l’Agence marocaine de sûreté et de sécurité nucléaires et radiologiques (AMSSNuR). « Garantir la sûreté et la sécurité passe nécessairement par la supervision réglementaire. »

Aider les organismes de réglementation des quatre coins de la planète à assurer la sûreté et la sécurité nucléaires des réacteurs de recherche est l’une des fonctions clés de l’AIEA. Dans le cas du Maroc, qui exploite un réacteur de recherche TRIGA Mark II, l’AIEA a aidé l’organisme de réglementation à devenir un modèle en matière de robustesse des inspections, d’indépendance et de fiabilité.

Toute activité ou pratique mettant en jeu des sources de rayonnements ionisants, à moins qu’elle ne soit exemptée ou exclue d’un régime réglementaire, doit être réglementée et contrôlée. En l’absence de contrôle, elle risque de faire plus de mal que de bien
Khammar Mrabit, directeur général de l’Agence marocaine de sûreté et de sécurité nucléaires et radiologiques (AMSSNuR)

Le réacteur de recherche TRIGA Mark II, qui fait partie du Centre national de l’énergie, des sciences et des techniques nucléaires (CNESTEN), est entré en service en 2007. La législation nucléaire du pays, adoptée en 1971, ainsi que sa loi sur la responsabilité civile, adoptée en 2005, n’avaient pas envisagé la possibilité de menaces telles que le terrorisme nucléaire, et selon Khammar Mrabit, l’organisme de réglementation ne disposait pas à l’époque d’un degré suffisant d’indépendance ; aussi a-t-il demandé l’aide de l’AIEA.

« D’un côté, il y a la législation et la réglementation, et de l’autre, il y a les exploitants, qui sont responsables au premier chef de la sûreté. Entre les deux, et en continu, il faut avoir un organisme de réglementation indépendant doté de fonctions, rôles et responsabilités bien définis en matière, par exemple, d’autorisation et d’inspection », explique Khammar Mrabit.

L’AIEA a appuyé le Maroc en ce qui concerne l’élaboration et l’adoption d’une nouvelle législation nucléaire en 2014 et la création d’un nouvel organisme de réglementation indépendant sous les auspices du Chef du gouvernement du pays. En 2016, des experts de l’AMSSNuR ont élaboré un plan d’action stratégique en vue d’actualiser leur système réglementaire. Plus de 30 parties prenantes venant des ministères compétents, des organisations professionnelles, des établissements d’appui technique et de l’AIEA ont pris part à ce processus.

Le réacteur de recherche TRIGA Mark II est la plus grande installation nucléaire du Maroc, et revêt de ce fait une haute priorité aux yeux des autorités et des experts techniques du pays. Il contribue à de nombreuses activités, notamment la recherche et la formation en médecine nucléaire, les applications industrielles et la gestion des déchets radioactifs. L’appui de l’AIEA en matière de supervision réglementaire comprend des missions d’examen, une aide à l’élaboration de réglementations et l’apport de compétences techniques.

En outre, le Maroc est devenu un pôle de formation en matière de supervision réglementaire des réacteurs de recherche, en Afrique du Nord et au-delà.

« Il est nécessaire d’avoir une vision et un plan clairs », dit Farhana Naseer, spécialiste de la sûreté nucléaire à l’AIEA. « Le Maroc a adopté dès le départ une approche cohérente, stratégique et graduée. L’expérience du pays sera une bonne source de meilleures pratiques et un modèle pour les autres pays. »

Le FORO

Dans d’autres régions aussi, des pays mettent en commun les meilleures pratiques en matière de supervision réglementaire des réacteurs de recherche. Par exemple, les organismes de réglementation du FORO (Forum ibéro-américain d’organismes de réglementation radiologique et nucléaire) mettent en commun leurs propres bonnes pratiques et s’appuient mutuellement en matière d’inspections réglementaires dans le cadre d’un projet conjoint.

« L’idée est d’échanger nos données d’expérience et de nous doter de critères réglementaires communs pour tous les réacteurs », dit Gerardo Lázaro, coordonnateur du projet et expert chargé de l’inspection des réacteurs de recherche à l’Institut péruvien de l’énergie nucléaire. « Nous faisons du très bon travail depuis 30 ans, en nous servant des normes de l’AIEA comme point de référence », affirme-t-il. « L’expérience accumulée dans tous les réacteurs de recherche de la région est considérable. Il est important de partager ces données d’expérience et les connaissances que nous avons acquises pour continuer à nous améliorer. »

L’objectif du projet est de produire, avec l’appui de l’AIEA, un manuel d’inspection standardisé en espagnol à l’intention des exploitants de réacteurs nucléaires de recherche. La finalisation du manuel est prévue pour 2020. Le manuel sera complété par des orientations de référence en matière de réglementation concernant la supervision de la gestion du vieillissement des réacteurs de recherche. La question du vieillissement suscite un intérêt croissant car tous les réacteurs de recherche des pays du FORO ont accumulé plusieurs années d’exploitation.

Il existe à l’heure actuelle 16 réacteurs de recherche en exploitation dans neuf pays d’Amérique latine et des Caraïbes ; 15 d’entre eux se trouvent dans des pays du FORO. Ces réacteurs fournissent des services essentiels, qui vont de la recherche et de l’enseignement universitaires à des applications dans les domaines de l’agriculture et de l’environnement, sans oublier la production de radio-isotopes à des fins médicales ou industrielles.

11/2019
Vol. 60-4

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