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Cultiver dans des conditions difficiles au Nigeria : les techniques nucléaires aident ceux qui fuient le terrorisme à tirer le meilleur parti d’un terrain hostile

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Les technologies d’irrigation au goutte-à-goutte ont contribué à augmenter de 60 % le rendement des cultures des agriculteurs de ce camp de déplacés d’Abuja (Nigeria), permettant à des milliers de personnes déplacées dans leur propre pays d’avoir nourriture et revenu. (photo : Fasina Abayomi/Université fédérale d’Oye-Ekiti, Nigeria)

Au Nigeria, beaucoup doivent fuir les terroristes et, s’agissant des personnes déplacées à l’intérieur du pays, trouver refuge dans des camps de fortune. En cette période difficile, l’agriculture représente pour certains une source de réconfort et de revenus. Liayatu Ayuba, agricultrice qui a fui Boko Haram, groupe terroriste d’Afrique de l’Ouest, vit maintenant dans un camp pour déplacés à Abuja, la capitale du Nigeria. Elle fait partie des plus de 2 500 personnes du camp d’Abuja à avoir reçu une formation et du matériel aux fins de la mise en place de systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte à petite échelle (voir la section En savoir plus), qui permettent une production vivrière depuis 2018.

« Être formé à cette nouvelle technologie agricole et la mettre en pratique, c’est comme retrouver des fragments de notre vie d’avant », déclare Liayatu Ayuba.

Cette aide est fournie dans le cadre d’un projet de coopération technique de l’AIEA mené en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Université fédérale d’Oye-Ekiti. À l’aide de la technologie nucléaire, l’AIEA a développé, en partenariat avec la FAO, des techniques permettant de cultiver les terres en utilisant un minimum d’eau, selon une approche nommée agriculture intelligente face au climat. Cette démarche a profité à des agriculteurs de nombreux pays. Dans le camp d’Abuja, les nouveaux systèmes d’irrigation ont aidé à augmenter de 60 % les rendements de cultures comme celles du concombre, de la pastèque et du gombo par rapport à d’autres méthodes, tout en diminuant de 45 % l’utilisation de l’eau.

« La culture et la vente de ces produits nous procurent un revenu, et nous travaillons à améliorer la vie de nombreuses personnes dans les camps en distribuant des aliments », explique Liayatu Ayuba. Plus de 80 % des résidents du camp sont des femmes et des enfants.

Beaucoup au Nigeria sont dans le même cas que Liayatu Ayuba. Plus de 2,7 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays depuis 2014 à cause de Boko Haram, selon l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, l’UNHCR. Le groupe a eu recours à des formes de violence extrêmes pour menacer des villages dans tout le pays, forçant les habitants à abandonner leur maison et leur moyen de subsistance.

Nombre des personnes concernées se retrouvent dans des camps de déplacés, où elles connaissent souvent la surpopulation et la pénurie alimentaire. Ces camps se composent de tentes de fortune et d’abris construits avec des débris de plastique et de métal, qui protègent à peine leurs occupants du soleil brûlant et de la chaleur du climat tropical

De nombreux camps sont situés dans des zones où les conditions climatiques sont éprouvantes : faibles précipitations, sécheresse et températures élevées y rendent la culture alimentaire difficile. Le changement climatique ne fait qu’accentuer la situation.

Après le succès à Abuja des systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte à petite échelle, l’Université fédérale d’Oye-Ekiti s’est associée avec Akabat Ventures, une ONG locale, en vue d’étendre l’utilisation de la technologie d’irrigation au goutte-à-goutte à d’autres camps dans le pays, notamment grâce au financement d’un fonds national, le Tertiary Education Tax Fund.

« Grâce à une formation et à un soutien, les agriculteurs, majoritairement des femmes, peuvent vraiment changer les choses, non seulement en assurant leur propre subsistance mais aussi en mettant en place un commerce qui fournit des aliments à d’autres occupants du camp. L’effet à long terme de cette opération sur la vie des gens est réel », déclare Thuloane Tsehlo, responsable de la gestion de programmes à l’AIEA qui dirige ce projet.

Formation des agriculteurs à l’irrigation au goutte-à-goutte

Depuis 2012, des scientifiques travaillent avec l’AIEA et la FAO au Nigeria pour aider les agriculteurs à utiliser des systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte et à cultiver des aliments en dépit des conditions climatiques difficiles et des aléas de leur vie. Cette aide a d’abord consisté à former 60 experts agricoles nationaux, en fournissant à la fois des avis d’experts et des équipements de laboratoire et de terrain.

Ces experts nationaux forment maintenant des étudiants de l’Université fédérale d’Oye-Ekiti à l’utilisation de la technologie d’irrigation au goutte-à-goutte, notamment à l’optimisation de l’utilisation des engrais et de l’eau. Les étudiants apprennent par exemple à contrôler l’humidité du sol et la quantité d’engrais nécessaire, déterminée par le suivi d’isotopes (voir la section En savoir plus). Les valeurs et les informations collectées sont ensuite communiquées aux agriculteurs de sorte qu’ils puissent avoir accès à des données en temps réel pour optimiser l’utilisation de l’eau dans les cultures. 684 étudiants ont ainsi été formés jusqu’à présent.

« C’est la formation des agriculteurs et des étudiants qui mène au changement », déclare Lee Heng, chef de la Section de la gestion des sols et de l’eau et de la nutrition des plantes à la Division mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture. « La formation sur le terrain permet d’utiliser cette technologie sur plusieurs générations et contribue avec succès à améliorer la sécurité alimentaire dans le pays, et pour les plus vulnérables dans les camps de déplacés, à l’aide de techniques agricoles durables adaptées au climat en évolution. »

Au cours des huit dernières années, des systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte ont été mis en place pour assurer la croissance des plantes sous le climat rude. Cette technologie nucléaire associée à la formation d’étudiants et d’agriculteurs est étendue à d’autres camps de déplacés dans le pays. (photo : Fasina Abayomi/Université fédérale d’Oye-Ekiti, Nigeria)

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