You are here

Culture principale en Afrique : l’agriculture intelligente face au climat permet aux agriculteurs d'obtenir des rendements records de manioc grâce à la science et à la technologie nucléaires

,

En adoptant des pratiques améliorées de gestion des nutriments, de l’eau et des sols, les agriculteurs de plusieurs pays africains ont pu doubler ou même tripler leurs rendements de manioc, culture commerciale la plus produite en Afrique et ingrédient essentiel de la cuisine locale. (Photo : M. Zaman/AIEA)

L’une des cultures les plus importantes pour la sécurité alimentaire en Afrique est celle du manioc, un légume racine consommé chaque jour par environ un demi-milliard de personnes. L’Afrique produit près de 200 millions de tonnes de manioc par an, soit environ 60 % de la production mondiale. Toutefois, le changement climatique, le manque d'eau et la baisse de la fertilité diminuent les rendements sur tout le continent, exposant de nombreuses personnes à des pénuries alimentaires et à la malnutrition. Des experts de l’AIEA et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) s’efforcent d'aider les agriculteurs africains à atténuer les effets du changement climatique en leur transmettant des pratiques durables et efficaces de gestion des nutriments, de l’eau et des sols.

« Grâce aux connaissances que nous avons acquises ici sur les pratiques agricoles intelligentes face au climat, nous sommes maintenant mieux informés et mieux équipés pour produire du manioc et nous espérons utiliser ces connaissances pour améliorer nos rendements », déclare Misses Unu, un agriculteur nigérian, en s’asseyant dans le champ après la récolte pour contempler des tas de gros tubercules de manioc. Avec de nombreux autres agriculteurs locaux d’une douzaine de pays africains, il a participé à des essais de démonstration sur le terrain menés par le Centre mixte FAO/AIEA du Département des sciences et des applications nucléaires de l’AIEA. L’objectif était de les former à produire plus de manioc et de meilleure qualité en utilisant des techniques nucléaires et des techniques d’agriculture intelligente face au climat. Les essais effectués de 2021 à 2023 se poursuivent dans plusieurs pays.

Le manioc est un légume racine riche en amidon qui ressemble à une patate douce. Après le riz et le maïs, c’est la troisième source de calories sous les tropiques. Introduit pour la première fois en Afrique au XVIe siècle par des marchands portugais en provenance du Brésil, il est devenu au fil des ans la culture commerciale la plus importantedu continent, profondément ancrée dans la cuisine locale. Chaque partie de cette culture peut véritablement être utilisée. Les feuilles sont riches en protéines, et le tubercule peut être bouilli, cuit à la vapeur, frit, coupé en rondelles ou transformé en fécule, en farine ou en aliments pour animaux. Le manioc est en outre relativement facile à cultiver, car il s’adapte bien aux conditions environnementales difficiles, notamment aux températures élevées et à la sécheresse. En raison de sa rusticité, les agriculteurs pensent souvent qu’il ne faut pas de nutriments ni d’eau pour cultiver le manioc, mais au bout de quelques années les nutriments s'épuisent et le rendement des cultures diminue.

Pour renforcer la sécurité alimentaire et augmenter les revenus des cultivateurs de manioc, l’AIEA a lancé en 2020 un projet de coopération technique en collaboration avec des instituts de recherche locaux et des associations d’agriculteurs en Afrique. Les agriculteurs de plusieurs pays africains ont pu doubler ou même tripler leurs rendements de manioc en adoptant des pratiques de gestion des nutriments, de l’eau et des sols élaborées par des experts du Centre mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l'agriculture.

La science nucléaire donne des indices sur les meilleures pratiques agricoles

Dans le cadre de ce projet, des chercheurs et des agriculteurs africains ont été formés à l’application des techniques nucléaires pour la production de manioc. Pour qu'une plante de manioc saine se forme et grandisse, pour la photosynthèse et son métabolisme, elle a besoin de 17 nutriments essentiels, en particulier l’azote, le potassium et le phosphore, dans des proportions précises.

Les carences en nutriments dans le sol entraînent de mauvais rendements, tandis que l’utilisation excessive d’engrais contenant ces mêmes nutriments peut polluer les eaux de surface et les eaux souterraines et accroître les émissions de gaz à effet de serre. Les techniques isotopiques peuvent contribuer à évaluer l’absorption par les plantes des engrais ajoutés et à suivre leur mouvement dans le sol, les plantes, l’eau et l’atmosphère.

« La science nucléaire nous aide à mieux déterminer la quantité exacte de nutriments dont le manioc a besoin et permet aux agriculteurs d’utiliser les engrais le plus efficacement à tout moment du cycle de vie de la plante », explique Mohammad Zaman, pédologue au Centre mixte FAO/AIEA.

La formation dispensée dans le cadre du programme de coopération technique de l’AIEA comprenait également des techniques isotopiques utilisant l’azote 15 (15N) pour mesurer l’efficacité de l’utilisation des engrais et des humidimètres à neutrons de rayons cosmiques qui aident à déterminer avec précision la quantité de nutriments et d’eau dont le manioc a besoin pour prospérer. « Les données recueillies avec ces méthodes peuvent aider les agriculteurs à apporter plus efficacement des nutriments et de l’eau afin de réduire au minimum leur gaspillage », a ajouté M. Zaman.

Guide de l’agriculteur pour une agriculture intelligente face au climat

En République centrafricaine, un agriculteur transporte des tubercules de manioc après la récolte. (Photo : M. Zaman/AIEA)

En appliquant des pratiques d’agriculture intelligente face au climat, il est possible d’accroître considérablement les rendements de manioc. Par exemple, environ 13 % de l’augmentation des rendements proviennent de la plantation de boutures racinées propres et saines, 17 % de l’amélioration de la fertilité des sols et 16 % de la lutte contre les insectes nuisibles et les maladies.

Pour aider les agriculteurs à obtenir de meilleurs résultats, les experts du Centre mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture ont préparé des consignes de production étape par étape qui comprennent des informations sur la sélection des variétés de manioc améliorées, la préparation du matériel de plantation, la gestion des sols et des ressources en eau, l’apport d'engrais et de nutriments, la lutte contre les insectes, les ravageurs et les maladies, ainsi que la récolte et le traitement après récolte.

Par la suite, plusieurs séances de formation sur l’application de ces méthodes et des essais dans les exploitations ont été organisés pour les agriculteurs au Burundi, en République centrafricaine, au Ghana, au Nigéria et au Rwanda.

Au Ghana, le manioc est la culture de base la plus importante. Sa production représente environ 22 % du PIB agricole et fait travailler plus de 70 % des agriculteurs, ce qui fait du pays l’un des cinq premiers producteurs de manioc en Afrique. Il est traditionnellement cultivé par les petits exploitants agricoles, qui l’utilisent pour préparer divers plats traditionnels, notamment le fufu, une pâte de manioc, ou le banku, un mélange de pâte de manioc et de maïs.

Le rendement moyen au Ghana est de 14 à 21 tonnes par hectare. Dans le cadre du projet de coopération technique, l’application de pratiques d’agriculture intelligente face au climat recommandées par le Centre mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture a permis de plus que tripler les rendements en fonction du site de l’exploitation et de la variété et de la quantité d’engrais organiques ou chimiques utilisées. Les essais de démonstration sur le terrain se sont soldés par une augmentation de rendement allant d’environ 20 tonnes à plus de 70 tonnes par hectare.

Des résultats similaires ou même supérieurs ont été observés dans d’autres pays. Au Burundi, où l’agriculture conventionnelle produit environ 12 tonnes par hectare, les méthodes nucléaires ont permis de récolter plus de 37 tonnes. Au Rwanda, l’agriculture intelligente face au climat a permis d’augmenter les rendements de moins de 15 tonnes à près de 62 tonnes. En République centrafricaine, les essais en champ ont permis de récolter une cinquantaine de tonnes, contre une dizaine en moyenne.

Le manioc contribue à générer des revenus, à créer des emplois et à garantir la sécurité alimentaire de millions d’Africains. « L’AIEA continuera d’aider les pays à utiliser des techniques agricoles améliorées par la science nucléaire pour la culture du manioc afin de consolider les économies, de stimuler le développement et de renforcer la sécurité alimentaire sur le continent africain », a déclaré Shaukat Abdulrazak, Directeur de la Division de l’Afrique du Département de la coopération technique de l’AIEA.

Suivez-nous

Lettre d'information