Le Directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, dirigera la semaine prochaine une mission d'experts qui se rendra à la centrale nucléaire ukrainienne de Tchornobyl pour intensifier l’action visant à prévenir le risque d'accident nucléaire pendant le conflit que connait actuellement le pays.
L'équipe de l'AIEA chargée de la sûreté, de la sécurité et des garanties nucléaires sera à Tchornobyl à partir du 26 avril pour livrer des équipements essentiels et procéder à des évaluations radiologiques et autres sur le site, qui a été aux mains des forces russes pendant cinq semaines avant qu’elles ne s’en retirent le 31 mars.
« La présence de l'AIEA à Tchornobyl sera d'une importance capitale pour nos activités de soutien à l'Ukraine, qui cherche à rétablir le contrôle réglementaire de la centrale et à garantir son exploitation sûre et sécurisée », a déclaré M. Grossi. « Cette mission sera suivie d'autres missions de l'AIEA dans cette installation et dans d'autres installations nucléaires en Ukraine dans les semaines à venir ».
Le mois dernier, le Directeur général s'est rendu sur un autre site nucléaire ukrainien important, la centrale nucléaire d'Ukraine du Sud, pour lancer l'initiative d'assistance de l'AIEA visant à réduire le risque d'un accident nucléaire majeur qui pourrait avoir de graves conséquences pour la santé humaine et l'environnement en Ukraine et ailleurs.
Depuis que le conflit a éclaté fin février, M. Grossi se dit vivement préoccupé par la sûreté et la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes. Il a également souligné que l'AIEA était déterminée et prête à veiller à ce que les sept piliers indispensables pour garantir la sûreté et la sécurité soient respectés. Plusieurs de ces piliers, notamment l'intégrité physique des installations, la possibilité pour le personnel d’exploitation de travailler sans pression indue et l'accès à l'alimentation électrique hors site, ont été gravement compromis au cours des deux derniers mois. En mars, par exemple, la centrale nucléaire de Tchornobyl a perdu à la fois les communications externes et l'alimentation électrique hors site, ce qui l'a obligée à compter sur des groupes électrogènes diesel de secours pendant plusieurs jours.
Durant sa première mission de ce type à Tchornobyl, l'AIEA fournira à l’exploitant divers types de matériel de surveillance radiologique, notamment des dispositifs d'identification des radionucléides et des débitmètres de dose gamma. Des équipements de protection individuelle seront également livrés à l'usine.
« Sur la base de nos mesures scientifiques et de nos évaluations techniques, nous pourrons mieux comprendre la situation radiologique sur place », a déclaré M. Grossi.
En outre, les experts en garanties de l'AIEA répareront les systèmes de télésurveillance des garanties installés au site, qui ont cessé de transmettre des données au Siège de l'Agence à Vienne au début du conflit.
Depuis que les militaires russes se sont retirés de la centrale nucléaire de Tchornobyl, l'Ukraine a pris d’importantes mesures aux fins de l'exploitation sûre et sécurisée du site de l'accident de 1986, où se trouvent maintenant diverses installations de gestion des déchets radioactifs. Elle a procédé au premier roulement de personnel en trois semaines et au début de cette semaine elle a rétabli les communications directes entre la centrale et l'organisme de réglementation nucléaire, qui avaient été interrompues pendant plus d'un mois.
Toutefois, la situation générale dans la région entourant le site, connue sous le nom de zone d'exclusion, reste difficile, notamment à cause des ponts endommagés et des activités de déminage, comme l’Ukraine l’a expliqué à l'AIEA cette semaine.
Comme il l'a fait à la centrale nucléaire d'Ukraine du Sud, le Directeur général rencontrera le personnel de la centrale de Tchornobyl pour le remercier du courage, de la résilience et de la détermination dont il a fait preuve dans l'accomplissement de ses tâches cruciales dans des circonstances extrêmement difficiles. Ne pouvant rentrer chez eux ni se reposer pendant plusieurs semaines, beaucoup ont travaillé sans relâche sur le site alors contrôlé par les forces russes.
« J'ai hâte de pouvoir m'entretenir avec le personnel et lui exprimer ma profonde gratitude pour tout ce qu'il a accompli dans des conditions aussi stressantes et difficiles. Ces personnes ont subi bien plus que nous ne pouvons imaginer et méritent notre respect et notre admiration pour avoir préservé la sûreté et la sécurité du site dans des conditions extrêmes », a déclaré M. Grossi.
En étroite coordination avec l'Ukraine, l'AIEA a établi des plans détaillés d’assistance en matière de sûreté et de sécurité pour les sites nucléaires du pays, soit quinze réacteurs répartis dans quatre centrales ainsi que la centrale nucléaire de Tchornobyl, où s'est produit il y a exactement 36 ans, le 26 avril, l’accident nucléaire le plus grave au monde.
« Au cours des deux derniers mois, la sûreté nucléaire en Ukraine a été sérieusement mise en péril à plusieurs reprises. Jusqu'à présent, le pire a été évité mais nous devons redoubler d’efforts pour que cela reste le cas. L'AIEA fera tout ce qu'elle peut pour contribuer à empêcher que le conflit n’entraîne également un accident nucléaire en plus des souffrances humaines et destructions considérables qu'il a déjà causées », a déclaré M. Grossi.
Au cours des dernières décennies, l'AIEA a appuyé le démantèlement et la gestion des déchets radioactifs et du combustible nucléaire usé à Tchornobyl.
« L'AIEA connaît très bien la centrale nucléaire de Tchornobyl. Cette connaissance des lieux et nos connaissances spécialisées en matière de sûreté, de sécurité et de garanties nucléaires nous permettent de déterminer rapidement quoi faire, comment et où", a déclaré M. Grossi.
Le Directeur général devrait tenir une conférence de presse à son retour à Vienne jeudi.