You are here

L’AIEA contribue à la lutte contre la fièvre aphteuse en Tunisie et au Maroc

,

À Nabeul, dans le nord-est de la Tunisie, un vétérinaire prélève un échantillon de salive sur une vache soupçonnée d’avoir la fièvre aphteuse. (Photo : T. Ben Hassine/Ministère tunisien de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche)

La fièvre aphteuse est une maladie très contagieuse qui touche les animaux biongulés, tels que les vaches, les porcs et les chèvres, et qui peut perturber le commerce régional et international d’animaux et de produits animaux. Elle se caractérise par une fièvre, des cloques entre les sabots et des aphtes dans la bouche, sur la langue et sur les lèvres. Elle peut avoir des effets graves sur la sécurité alimentaire et sur l’économie, mais les techniques nucléaires peuvent aider à la combattre.

Identification de la maladie en un temps record en Tunisie

Au début de cette année, un laboratoire de virologie en Tunisie a reçu les échantillons de salive de vaches soupçonnées par les vétérinaires d’avoir contracté la fièvre aphteuse. Quelques jours après avoir soumis ces échantillons à un service de séquençage génétique, Soufien Sghaier, virologue au laboratoire de virologie de l’Institut de la recherche vétérinaire de Tunisie (IRVT), a reçu des résultats qui ont permis de confirmer la souche de fièvre aphteuse en circulation. M. Sghaier a pu avertir les autorités vétérinaires afin qu’elles prennent des mesures de contrôle pour éviter la propagation de la maladie. Cette confirmation rapide a été rendue possible grâce à l’AIEA, en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), qui facilite le service de séquençage et dispense la formation nécessaire au traitement des résultats. 

« Nous avons reçu très rapidement les résultats du séquençage concernant cette suspicion de fièvre aphteuse. Les échantillons ont été envoyés à un laboratoire de Berlin le vendredi et nous avons reçu les résultats du séquençage le lundi après-midi », explique M. Sghaier. « Nous avons ainsi pu rapidement effectuer une analyse pour identifier la souche spécifique de fièvre aphteuse, moins d’une semaine après avoir reçu les échantillons. Le mardi, nous avons envoyé le rapport sur la souche de la fièvre aphteuse aux autorités vétérinaires. » La souche de la fièvre aphteuse doit être identifiée afin de sélectionner ou de mettre au point un vaccin efficace. 

Le séquençage génétique est important pour déterminer si une maladie en circulation est endémique — ou typique d’une certaine région — ou provient d’une autre région. « Le séquençage génétique peut aider à comprendre à quel groupe appartient un agent pathogène — organisme qui provoque la maladie — et quel vaccin est efficace contre lui », explique Ivancho Naletoski, administrateur en santé animale au Centre mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture. « Le séquençage est également important pour aider à identifier les schémas de mutation des agents pathogènes. » Il permet de générer un arbre phylogénétique décrivant la lignée d’une espèce.  

« Par l’analyse phylogénétique, nous avons établi que nous avions déjà un vaccin pouvant protéger notre bétail. Les autorités vétérinaires ont procédé à une vaccination périfocale pour réduire le risque de propagation », explique M. Sghaier. La vaccination périfocale, ou vaccination tampon, se fait tout autour de la zone touchée pour empêcher la propagation du virus à d’autres régions.

Contrôler la maladie au Maroc

(Photo : F. El Mellouli/LRARC)

En 2020, les autorités vétérinaires marocaines ont identifié une nouvelle souche du virus de la fièvre aphteuse à l’aide de techniques nucléaires. Celles-ci ont permis de mener des campagnes de vaccination dans le pays. L’appui de l’AIEA et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a grandement contribué au succès de ces campagnes.
 
La fièvre aphteuse touche les bovins et les ruminants, qu’ils soient domestiques ou sauvages. Très contagieuse, elle peut être mortelle pour l’animal et avoir des effets graves sur la sécurité alimentaire et l’économie. Le Maroc compte environ 29 millions de bovins, d’ovins, de caprins et de chameaux. L’élevage contribue à près de 13 % de son PIB agricole.

En janvier 2019, il y a eu des foyers de fièvre aphteuse dans plusieurs provinces du Maroc et les troupeaux ont été rapidement infectés en cinq endroits. À chaque cas confirmé, tout le bétail a été abattu dans un rayon de trois kilomètres et une zone de surveillance a été établie dans un rayon de dix kilomètres, avec interdiction de vendre des animaux et des produits alimentaires d’origine animale.

Pour maîtriser rapidement la propagation de la maladie, le Laboratoire régional d’analyses et de recherches de Casablanca (LRARC) a utilisé des techniques nucléaires permettant des analyses rapides et précises. Les autres techniques prennent plus de temps, ce qui suppose un plus grand nombre d’animaux infectés et un coût de l’épidémie plus élevé.

« Le véritable enjeu pour les autorités vétérinaires nationales était de savoir si les foyers épidémiques provenaient de la même souche que celle détectée en 2015 lors de l’épidémie précédente », explique Ivancho Naletoski.

En 2017, les experts de la Division mixte FAO/AIEA, avec l’appui du programme de coopération technique de l’AIEA, ont formé 10 spécialistes de laboratoires vétérinaires du Maroc et leur ont fourni du matériel permettant de déceler la maladie et de cibler les mesures de contrôle et de riposte. Les participants à la formation comprenaient des membres du personnel du LRARC, qui ont ensuite identifié la nouvelle souche de fièvre aphteuse au début de 2019 en utilisant leurs compétences nouvellement acquises et le service de séquençage génétique mis en place par la Division mixte.

Peu après l’apparition de l’épidémie de fièvre aphteuse, le laboratoire vétérinaire marocain a séquencé le génome spécifique du virus et l’a comparé aux souches locales. Dans le même temps, il a envoyé des échantillons pour analyse des séquences génétiques au Laboratoire de santé animale de l’ANSES à Maisons-Alfort (France). Cette institution de référence pour l’identification de la fièvre aphteuse a confirmé le diagnostic du LRARC.

« L’identification de la souche d’un virus est la première mesure que prennent les autorités vétérinaires nationales en cas d’apparition d’un foyer. La seconde étape consiste à choisir ou mettre au point un vaccin approprié, car chaque souche nécessite un vaccin spécifique », explique M. Naletoski.

Une fois la nouvelle souche et le vaccin identifiés, les autorités vétérinaires marocaines ont mené des campagnes de vaccination efficaces, enrayant rapidement la propagation de la maladie. Dans tout le pays, les ruminants à risque (bovins, caprins et ovins) ont été vaccinés en masse sans coût pour les éleveurs. Ces campagnes ont contribué à renforcer l’immunité des animaux et empêché la propagation du virus.

« Les techniques de séquençage génomique transférées par l’AIEA à notre laboratoire nous ont permis d’identifier rapidement les souches en circulation dans le pays et d’adapter en conséquence les plans de lutte contre la maladie », explique Fatiha El Mellouli, qui dirige le Service de la santé animale et végétale du LRARC.

Un an plus tard, les résultats sont tangibles pour les éleveurs, les producteurs et les exportateurs d’animaux et de produits animaux au Maroc. Le pays poursuit son programme national de lutte contre la fièvre aphteuse, soutenu par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) depuis 2012, ainsi que ses efforts visant à améliorer la santé animale et le commerce des produits d’origine animale.

Le service de séquençage génétique de l’AIEA-FAO

Il y a cinq ans, le Centre mixte FAO/AIEA a lancé son service gratuit de séquençage génétique pour permettre aux pays d’effectuer une analyse approfondie des agents pathogènes. À ce jour, plus de 5 300 échantillons ont été soumis par 30 laboratoires de 24 pays d’Afrique, d’Asie et du Pacifique, d’Europe et d’Amérique latine. La peste porcine africaine, l’astrovirus, la grippe aviaire, le capripox, le coronavirus, le lyssavirus, la maladie de Newcastle, le circovirus 2 du porc, la peste des petits ruminants et le virus du Nil occidental sont les dix agents pathogènes les plus fréquemment séquencés.  

« Installer des technologies de séquençage génétique dans les laboratoires locaux coûte cher », affirme M. Naletoski. « Il ne faut pas effectuer de séquençage massif pour chaque isolat, seuls quelques échantillons provenant des foyers sélectionnés sont nécessaires. Sur le plan de la faisabilité économique, il est judicieux de mettre en place un système permettant aux partenaires un accès à un service de séquençage. » L’AIEA a élaboré et diffusé des directives techniques détaillées pour traiter les données brutes et générer les arbres phylogénétiques des agents pathogènes locaux, sur la base des résultats fournis. 

Le Centre mixte FAO/AIEA a organisé des sessions de formation sur l’utilisation du service destinées aux laboratoires en 2017 au Maroc et en 2018, en Argentine. Une formation en ligne d’introduction au service de séquençage génétique est prévue dans le cadre de l’initiative ZODIAC (Action intégrée contre les zoonoses) à la fin du mois d’avril 2022. Elle sera suivie de formations en présentiel.  

L’avantage de ce service est double. Au niveau national, le service aide les programmes de surveillance des maladies. Au niveau mondial, il appuie les études et contribue aux bases de données de séquençage génétique accessibles à la communauté scientifique internationale. À ce jour, plus de 30 articles découlant des résultats obtenus à l’aide du service de séquençage ont été publiés dans des revues examinées par des pairs, et des dizaines de séquences ont été publiées dans les bases de données mondiales à code source ouvert, GenBank et GISAID

Pour en savoir plus sur le travail de l’AIEA en matière de maladies animales et zoonoses transfrontalières, cliquer ici.

Suivez-nous

Lettre d'information