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« Un tournant » : Le tout premier Sommet sur l’énergie nucléaire s’achève à Bruxelles

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La dynamique mondiale en faveur de l’énergie d’origine nucléaire s’est poursuivie, comme illustré par le fait que les dirigeants de plus de 30 pays et de l’Union européenne (UE) se sont réunis à Bruxelles à l’occasion du premier Sommet sur l’énergie nucléaire. Ce sommet historique, première réunion mondiale de haut niveau entièrement consacrée à l’énergie nucléaire, s’inscrit dans la continuité de la reconnaissance historique obtenue par le nucléaire lors de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28) qui s’est tenue en décembre dernier.

Des représentants de haut niveau de dizaines de pays ont souligné l’importance de l’utilisation de l’énergie d’origine nucléaire pour assurer la sécurité énergétique, atteindre les objectifs climatiques et favoriser le développement durable. La montée en puissance des financements, la formation de personnel et un soutien plus résolu aux pays primo-accédants ont été mis en avant comme des éléments clés d’un succès durable.

Dans son allocution liminaire, le Directeur général de l’AIEA, Rafael Mariano Grossi, qui coprésidait le Sommet avec le Premier Ministre belge Alexander de Croo, a souligné la nécessité d’agir. « Il ne suffit pas de reconnaître la nécessité du nucléaire. Il incombe aux dirigeants politiques de créer des environnements propices au développement du nucléaire. Sans des mesures décisives, le potentiel du nucléaire en matière de facilitation de la transition verte pourrait être gâché. » M. Grossi s’est également exprimé lors d’une manifestation parallèle organisée par le Centre commun de recherche (CCR) mercredi dernier, ainsi que lors d’une discussion informelle organisée par l’ONG Nuclear Threat Initiative.

Rafael Mariano Grossi, IAEA Director-General, delivers his opening remarks at the Nuclear Energy Summit in Belgium. (Photo: D. Calma/IAEA)

Dans leurs déclarations, les chefs d’État et autres représentants nationaux de haut niveau ont présenté la situation du nucléaire dans leurs pays respectifs et recensé les facteurs qu’ils jugeaient importants pour pouvoir respecter les délais fixés pour la transition vers les énergies propres, notamment les approches technologiquement neutres, telles que les lois et réglementations qui ne favorisent pas une source d’énergie propre par rapport à une autre.

« Pour nous, le défi est d’obtenir des résultats dans la lutte contre les changements climatiques et de réduire nos émissions de CO2, de conforter notre souveraineté en sécurisant notre énergie et d’améliorer notre compétitivité afin d’en même temps créer des emplois », a déclaré le Président français Emmanuel Macron. L’énergie d’origine nucléaire représente actuellement environ 25 % de la production mondiale d’électricité bas carbone, mais il faudra considérablement intensifier son déploiement au cours des prochaines décennies pour parvenir à la neutralité carbone à l’échelle mondiale d’ici à 2050. La COP28 a marqué la première fois où l’énergie d’origine nucléaire a été incluse dans le bilan mondial, un accord final qui évalue où en est le monde dans la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris de 2015 et comment les lacunes peuvent être corrigées. Au total, 22 pays ont accepté d’œuvrer au triplement de la capacité de production d’énergie d’origine nucléaire d’ici à 2050, et trois autres pays ont signé l’engagement depuis.

« Le Sommet marque un tournant dans l’avenir du nucléaire civil », a déclaré le Ministre turc des affaires étrangères, Hakan Fidan. « Une fois pleinement opérationnelle, la centrale nucléaire d’Akkuyu nous permettra de satisfaire 10 % de notre demande d’électricité. Notre objectif est d’augmenter cette proportion en construisant des centrales classiques supplémentaires ainsi que des petits réacteurs modulaires. »

« Pendant longtemps, nous avons été nombreux à émettre des réserves... mais les temps ont changé, les technologies de sûreté ont évolué et, bien sûr, notre perception de l’urgence d’un avenir sans énergie fossile a radicalement changé au cours des dernières décennies », a déclaré Mark Rutte, Premier Ministre du Royaume des Pays-Bas. « Il est vrai que pour réussir la transition, nous avons besoin de toutes les sources d’énergie décarbonées que nous pouvons obtenir. Mais nous avons également besoin d’une source disponible par tout temps. Et cette énergie, c’est l’énergie nucléaire. »

À la veille du Sommet, MM. Grossi et de Croo, ainsi que la Ministre belge de l’énergie, Tinne Van der Straeten, ont rencontré plus de 70 jeunes militants favorables aux technologies nucléaires et renouvelables afin de discuter du rôle de l’énergie d’origine nucléaire dans la transition vers les énergies propres.

« Qui dit neutralité carbone dit nucléaire, car c’est le seul moyen de décarboner complètement l’économie », a déclaré M. de Croo lors de l’événement organisé avec les jeunes. « Nous aurons besoin de beaucoup d’énergies renouvelables, mais aussi de beaucoup de nucléaire. »

La Commission européenne a récemment lancé l’Alliance industrielle européenne pour les petits réacteurs modulaires (PRM) afin d’accélérer le développement et le déploiement de ces réacteurs. « L’analyse de l’AIEA nous indique que les investissements doivent s’accélérer en cette décennie et être portés à de nouveaux sommets dans les années 2030 pour atteindre l’objectif fixé dans l’Accord de Paris », a déclaré la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. « Cela nécessite le soutien des gouvernements pour garantir que les financements sont disponibles et que la contribution du nucléaire à la sécurité de l’électricité est correctement évaluée et rémunérée. »

« Aujourd’hui, je peux vous assurer que le nucléaire revient, et qu’il revient en force », a déclaré Fatih Birol, directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie, faisant écho aux projections de son organisation selon lesquelles la production d’énergie d’origine nucléaire devrait atteindre un niveau record en 2025.

Les représentants de l’industrie ont également affirmé, dans une déclaration commune, qu’ils étaient prêts à appuyer les efforts des gouvernements en vue de l’expansion de l’électronucléaire. Ils se sont engagés à travailler en étroite collaboration avec les gouvernements intéressés et à faciliter la poursuite de l’exploitation des centrales nucléaires existantes, la construction de nouvelles centrales et le développement de l’infrastructure nucléaire.

« L’énergie nucléaire est essentielle pour lutter contre la crise climatique et construire une économie fondée sur une énergie propre, résiliente et fiable, tant aux États-Unis que dans le reste du monde », a déclaré John Podesta, conseiller principal du Président pour l’énergie propre, l’innovation et la mise en œuvre aux États-Unis d’Amérique.

Quatre tables rondes ont été organisées et ont permis d’aborder des sujets tels que le maintien et l’expansion de la capacité nucléaire, les progrès technologiques, les innovations en matière de cycle du combustible et la facilitation d’un marché équitable de l’énergie propre par l’intermédiaire de mécanismes de financement, entre autres choses.

Melanie Nakagawa, responsable du développement durable chez Microsoft, a parlé de l’importance de stimuler la demande d’électricité propre dans le cadre de partenariats avec les entreprises. « En tant qu’entreprise de technologie, notre rôle est d’être un signal de demande pour toutes les technologies d’énergie décarbonées, y compris les technologies émergentes, des PRM aux réacteurs avancés et à la fusion, y compris pour nos fournisseurs. » En début de semaine, Microsoft, Google et Nucor, une entreprise sidérurgique, ont annoncé une collaboration en faveur d’une électricité décarbonée. « Dans cette perspective, la question, qu’il s’agisse de réacteurs avancés, de la technologie de fusion, de la géothermie avancée ou de stockage de l’énergie à long terme, c’est comment les acteurs concernés peuvent arriver sur le marché pour nous fournir l’offre que nous demandons et qui nous permettra d’atteindre nos objectifs », a-t-elle déclaré.

Un représentant de haut niveau ainsi que deux cadres de Google étaient également présents au Sommet.

La nécessité pour les gouvernements de collaborer avec l’industrie pour déployer l’énergie de fusion a également été abordée. « Je pense que la faisabilité de la fusion nucléaire comme source d’énergie sera démontrée dans un délai relativement court, dans une décennie », a déclaré Pietro Barabaschi, directeur général du Réacteur expérimental thermonucléaire international (ITER). « Mais sa viabilité comme source d’énergie fiable exige beaucoup d’imagination. Cela nécessitera un programme mondial de développement de la fusion. »

Représentée au Sommet par le Vice-Premier Ministre de la République populaire de Chine, Zhang Guoqing, par le vice-président de l’Autorité chinoise de l’énergie atomique, Liu Jing, et par le vice‑président de la Compagnie nucléaire nationale chinoise, Shudong Cao, la Chine ambitionne de pouvoir atteindre une puissance nucléaire installée d’environ 400 GWe d’ici à 2060, soit une puissance supérieure à la capacité du parc mondial de réacteurs actuel. Selon M. Cao, l’expansion de la Chine passera par une combinaison de technologies, allant de grands réacteurs classiques aux réacteurs innovants comme le HTR-PM, un petit réacteur modulaire à haute température refroidi par gaz que la Chine a mis en service l’année dernière. « L’énergie nucléaire présente des avantages uniques pour lutter contre les changements climatiques et garantir la sécurité énergétique », a déclaré M. Guoqing.

« Le Sommet sur l’énergie nucléaire doit être un tournant pour l’énergie nucléaire et susciter des investissements à l’échelle mondiale dans toutes les économies », a déclaré M. Grossi. « L’AIEA, née d’une vision du nucléaire au service de la paix et de la prospérité, est là pour soutenir cette transition. »

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