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De la fève de soja au traitement du cancer

Ou comment l’Indonésie, initialement bénéficiaire de la PUI, est devenue l’un des pays donateurs du programme.

Miklos Gaspar

Projets appuyés par l’AIEA en Indonésie

(Photos : M. Gaspar/AIEA)

L’Indonésie a obtenu, ces dix dernières années, un soutien considérable de l’Initiative sur les utilisations pacifiques (PUI), qui lui a permis de réaliser un certain nombre d’avancées majeures, notamment la mise au point de nouvelles variétés de fèves de soja et de riz, et ce dans le cadre de projets financés sur le budget ordinaire et le fonds de coopération technique de l’AIEA, et avec l’appui de la PUI. Il y a quelques années, elle a été l’un des premiers pays en développement à apporter son concours à la PUI sous la forme de contributions financières, mais aussi de ressources humaines - elle a ainsi envoyé des experts dispenser conseils et formations dans d’autres pays.

Pour évoquer ce double rôle de bénéficiaire et de donateur endossé par l’Indonésie, Miklos Gaspar, Rédacteur en chef du Bulletin de l’AIEA, a rencontré Darmansjah Djumala, Ambassadeur de l’Indonésie à Vienne, Représentant permanent de l’Organisation des Nations Unies à Vienne et ancien Président du Conseil des gouverneurs de l’AIEA.

Q : Comment l’Indonésie a-t-elle bénéficié de la PUI ?

R : Permettez-moi tout d’abord de préciser la position prise par notre gouvernement dans le cadre de sa politique étrangère pour ce qui concerne les applications de la technologie nucléaire. Si je souhaite aborder la question sous cet angle, c’est parce que la PUI correspond bien avec notre conception du développement national.

Le gouvernement met en œuvre une politique étrangère que notre Président qualifie de pragmatique, ce qui signifie qu’elle est focalisée sur les résultats tangibles de la diplomatie. Bien que l’on pense souvent que la diplomatie consiste essentiellement à tenir des discours en public et à mener des négociations, notre gouvernement y voit pour sa part un exercice très concret. En quoi la politique étrangère peut-elle profiter aux citoyens ? Que pouvons-nous apporter concrètement à la population ?

Et cela vaut aussi, à peu de choses près, pour notre diplomatie nucléaire. Nous devons faire en sorte que la diplomatie nucléaire profite directement à la population. C’est pourquoi nous avons choisi de miser ici sur les applications de la technologie nucléaire - et c’est précisément en cela que la PUI nous aide. Nous sommes très satisfaits de cette initiative parce qu’elle s’inscrit parfaitement dans notre politique étrangère pragmatique.

Grâce à la PUI, nous pouvons amener notre pays à profiter du soutien de l’AIEA. Ses avantages directs sont particulièrement visibles dans l’agriculture et la sécurité alimentaire, notamment pour ce qui concerne la sélection végétale, l’élevage et la lutte contre les insectes ravageurs. Nous avons réalisé des progrès considérables dans la mise au point de variétés de fèves de soja. Nous avons amélioré la performance de reproduction du bétail, ce qui a très utile pour les agriculteurs de nombreux villages. L’appui fourni a été très efficace. L’Initiative nous a aussi apporté une aide précieuse dans le domaine de la cancérothérapie et dans le secteur de l’environnement.

Les projets menés avec l’appui de la PUI nous ont beaucoup apporté et nous nous en félicitons.

Q : En quoi la PUI a-t-elle complété l’aide que vous recevez de l’AIEA dans le cadre de la coopération technique et des projets de recherche coordonnée auxquels l’Indonésie participe ?

R : La PUI nous a permis de disposer de ressources budgétaires qui sont venues s’ajouter à celles déjà allouées au titre du budget ordinaire et du programme de coopération technique. Elle est devenue un excellent moyen pour les États Membres de contribuer à d’autres programmes de l’AIEA en lien avec les applications pacifiques de la technologie nucléaire. Nous espérons qu’à l’avenir, davantage d’États Membres choisiront à leur tour de fournir des ressources financières ou humaines dans le cadre de cette Initiative, car cela ne ferait que profiter plus encore à l’Indonésie.

Q : Pourquoi l’Indonésie a-t-elle choisi de contribuer à la PUI ?

R : La PUI nous a servi, comme on le sait, à former nos scientifiques et à développer leurs compétences dans le domaine des technologies liées aux applications nucléaires.

L’Indonésie se considère comme une pionnière de la coopération Sud-Sud. Nous estimons qu’après avoir reçu de l’aide des uns et des autres, il arrive un moment où nous nous devons de leur rendre la pareille et d’apporter à notre tour notre contribution, afin que d’autres pays puissent aussi en bénéficier. Nous avons reçu l’appui de l’AIEA et en avons tiré parti ; l’heure est venue d’en faire profiter d’autres pays moins avancés dans leur développement. C’est la raison pour laquelle nous sommes heureux de pouvoir partager ce dont nous avons bénéficié avec d’autres pays en développement dans le cadre de la coopération Sud-Sud. L’Indonésie étant elle-même un pays en développement, nous sommes bien placés pour comprendre les besoins de ceux qui en sont à ce même stade. Nous voulons nous montrer solidaires envers eux.

Q : De quelle manière l’Indonésie apporte-t-elle son soutien à la PUI ?

R : Notre contribution à la PUI prend des formes très diverses. Nos centres collaborateurs de l’AIEA nous ont permis d’organiser des formations portant sur une série de projets de coopération technique financés par l’AIEA. Nous y invitons des scientifiques originaires de pays en développement d’Afrique et d’Asie. Nous envoyons par ailleurs des experts scientifiques dans d’autres pays, comme en Papouasie-Nouvelle-Guinée, où ils sont chargés de guider les autorités nationales dans l’élaboration de leur infrastructure de réglementation relative aux applications nucléaires. Nous accueillons aussi des boursiers pratiquement chaque trimestre.
Bien que notre niveau global de développement ne soit pas parmi les plus élevés, nous nous situons à un niveau intermédiaire en ce qui concerne les applications nucléaires, et avons des connaissances et des compétences spécialisées à partager. Nous avons aussi apporté notre soutien au projet ReNuAl, qui porte sur la rénovation des laboratoires des applications nucléaires, car nous considérons qu’ils sont d’une importance majeure pour la recherche-développement et le renforcement des capacités.

Q : Comment envisagez-vous la deuxième décennie de la PUI ? Quels sont, à vos yeux, les domaines sur lesquels il conviendrait de mettre l’accent, non seulement pour l’Indonésie, mais pour les pays en développement en général ?

R : La PUI est un instrument qui peut favoriser la réalisation d’un certain nombre d’objectifs de développement durable (ODD) fixés par les Nations Unies. Il serait bon qu’au cours de la prochaine décennie, l’Initiative continue de s’aligner sur les ODD. Nous devons poursuivre les projets axés sur le renforcement de la sécurité alimentaire, sur le changement climatique et sur d’autres problèmes environnementaux, tout en appuyant les programmes qui s’intéressent aux soins de santé et à l’industrie.

Je soutiens résolument le nouveau projet d’Action intégrée contre les zoonoses (ZODIAC) de l’AIEA. Il est tout à fait adapté aux besoins du secteur de la santé et vient fort à propos compte tenu de la pandémie de COVID-19. Je veux croire que les pays donateurs et tous les États Membres de l’AIEA adhèreront à ce nouveau projet, ainsi qu’à celui qui vise à lutter contre la pollution par le plastique, afin qu’ils puissent être mis en œuvre rapidement.

11/2020
Vol. 61-4

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